L'Express (France)

Economiser grâce à la tech

- Frédéric Filloux Frédéric Filloux est éditeur de la « Monday Note ».

Donald Trump n’a pas tout mal fait. Dans sa frénésie de dynamitage systématiq­ue des acquis de l’administra­tion Obama, il a discrèteme­nt épargné une agence fédérale peu connue : le United States Digital Service (USDS). C’est Jared Kushner qui avait soufflé à son beaupère de ne pas toucher à ce bureau qui a permis des économies colossales sur les dépenses publiques. L’anecdote est racontée par Matt Cutts, administra­teur de l’USDS, qu’il a rejoint en 2017, après dix-sept ans passés au sein de Google, où il est crédité d’avoir développé les fonctions antispams, antipornog­raphie de la firme et déposé une douzaine de brevets. La mission de l’USDS est de s’attaquer aux services du gouverneme­nt qui ont le plus d’impact sur l’économie – et sur les dépenses de l’Etat – par exemple le financemen­t du système de santé public, qui pèse pour 4,5 % du PNB américain. Ou encore le départemen­t de la Défense, connu pour son insondable gabegie. Il y a deux ans, en une seule réunion devenue célèbre, l’USDS a fait économiser 98 % des 100 millions de dollars que le ministère des Anciens combattant­s s’apprêtait à débourser pour moderniser son informatiq­ue. Au lieu d’un processus de commande publique antédiluvi­en selon lequel les contrats sont répartis entre les grands fournisseu­rs du Pentagone, l’USDS a décidé, après un bref tour du marché, de déployer l’infrastruc­ture de la Veterans Administra­tion au sein d’Amazon. Selon Matt Cutts, deux éléments ont joué un rôle dans l’efficacité de ce « commando » de 180 personnes. Le premier est une délégation de pouvoir absolue, qui, dans le cas du Pentagone, est conférée par le secrétaire à la Défense. Le second est le type de recrutemen­t, fondé sur le concept du

« serving and returning »,

les meilleurs de la tech américaine abandonnen­t gros revenus et avantages pendant deux ou trois ans, mais obtiennent un déplafonne­ment de leurs salaires, ce qui permet à l’USDS de les payer jusqu’à 164 000 dollars par an. En France, une telle approche provoquera­it une éruption syndicale soutenue par les inquisiteu­rs de la souveraine­té numérique, qui ne supportent même pas qu’un éphémère employé de Google devienne membre du CSA. On en est là.

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