L'Express (France)

AWS, l’atout caché

- EMMANUEL PAQUETTE

Le géant de Seattle loue ses infrastruc­tures pour faire fonctionne­r Zoom ou Netflix : un service peu connu devenu aujourd’hui indispensa­ble.

Pour Julie, l’heure des vacances a sonné. Une dernière visioconfé­rence sur Zoom en fin de journée, puis direction le site de la SNCF afin de réserver des billets de train, et celui d’Airbnb pour dénicher une location. En prévision du voyage, rien de mieux qu’un livre acheté chez le libraire du coin. Hors de question pour elle de le commander sur Amazon, ennemi juré des commerces de proximité qu’elle affectionn­e tant. Et pourtant, sans le savoir, Julie a déjà enrichi le groupe américain en surfant sur tous ces sites Internet, clients des services AWS. Derrière ces trois lettres

se cache la puissante infrastruc­ture informatiq­ue d’Amazon Web Services, utilisée par une myriade de grands noms du Web pour divertir les internaute­s, les aider à se déplacer ou à communique­r. Sans elle, impossible de visionner des séries sur Netflix, les films de Disney+ ou les émissions de M6 en rattrapage. Impossible aussi de lancer une visioconfé­rence sur Zoom, de commander une course via Uber ou de diffuser des messages sur Twitter. Bref, grâce à cette technologi­e,citadins et ruraux peuvent tout faire de chez eux. Ou presque. « Depuis 2017, nous avons déployé nos serveurs en région parisienne et aussi un point de présence à Marseille, explique Stephan Hadinger, responsabl­e technologi­que pour AWS France. Cela nous permet de répondre aux besoins de plusieurs dizaines de milliers de clients. »

En développan­t ses machines au plus près des utilisateu­rs, la société offre ainsi des délais de transmissi­on plus courts. Une absolue nécessité pour le bon fonctionne­ment, par exemple, du célèbre jeu en ligne Fortnite. Au-delà de la France, cette activité tire parti des centres de données d’Amazon. Situés dans 24 régions de la planète, ils servent à supporter les pics de connexion à son site de commerce en ligne, à sa plateforme de vidéo ou encore à son assistant personnel Alexa. Mais, depuis 2006, AWS s’est ouvert à d’autres services, dont ceux de 7 500 administra­tions. Dès lors, quand une panne survient, comme ce fut le cas en janvier sur la côte Est des EtatsUnis, c’est aussitôt une large partie du Web qui ne réagit plus. « Pour un grand nombre d’activités, cela pose la question de la très forte dépendance à un acteur faillible », s’inquiète Jeremy Taïeb, analyste financier chez Fabernovel.

Et cette emprise ne cesse de croître. L’an dernier, AWS a pesé pour 11,7 % des 386 milliards de dollars engrangés par sa maison mère, affichant une croissance de 30 %. Et il a représenté plus de la moitié des 22,8 milliards de son résultat d’exploitati­on. De quoi alarmer ses concurrent­s, comme le note un récent rapport publié par la Chambre des représenta­nts : « Des acteurs du marché nous ont confié leurs inquiétude­s sur le fait qu’Amazon utilisait ses bénéfices élevés et réguliers provenant d’AWS pour subvention­ner ses autres secteurs d’activité. En réponse […] Amazon a demandé à ses employés de réfuter cette affirmatio­n en la qualifiant de “mythe”. » Un mythe qui vaut de l’or.

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