Israël A Nazareth, un maire arabe et pro-Netanyahou
L’entente d’élus musulmans avec le Premier ministre de droite s’inscrit dans le cadre, plus large, du rapprochement israélo-arabe à l’échelle internationale.
Menée avec succès, la campagne éclair de vaccination anti-Covid produit ses premiers effets politiques. « Ce que le Premier ministre a fait, personne d’autre ne l’a fait », proclamait ainsi, le 13 janvier,
Ali Salam, le maire de Nazareth, en présence de Benyamin Netanyahou. Les deux hommes tenaient une conférence de presse dans la principale ville arabe du pays (80 000 habitants), située à 150 kilomètres au nord de Jérusalem, afin d’inciter les Arabes israéliens à participer à la campagne de vaccination. A l’extérieur de la mairie, des manifestants ont conspué le chef de gouvernement juif et l’édile musulman. Pas suffisant, toutefois, pour impressionner Ali Salam : « Ces gens-là ne représentent rien ! Le peuple arabe est derrière vous, M. le Premier ministre ! » a-t-il martelé.
Inimaginable voilà quelques années, ce genre de prise de position arrange les affaires de Benyamin Netanyahou avant les élections législatives du 23 mars prochain. Entrepreneur à succès, homme politique de premier plan et père de 11 enfants, Ali Salam se trouve en effet à la tête d’un mouvement d’élus locaux arabes en rupture avec l’hostilité systématique des députés musulmans envers le président du Likoud.
Selon Salam, ces derniers
« estiment que leur rôle consiste seulement à organiser des manifestations et à attiser les tensions plutôt que d’aider à régler les problèmes du quotidien ». La fracture entre ces deux tendances arabes n’est pas nouvelle, mais elle se creuse. Avec, d’un côté, une quinzaine de députés à la Knesset, presque uniquement préoccupés par la question du conflit israélo-palestinien, et, de l’autre, des élus de terrain, qui se consacrent à des sujets concrets : Covid, délinquance ou discriminations à l’encontre des Arabes israéliens.
En octobre 2015, la confrontation entre les deux « camps » a pris un tour spectaculaire. Sur un plateau de télévision, Ali Salam a accusé le chef de file des députés arabes, Ayman Odeh, d’encourager le terrorisme anti-israélien : « Tire-toi d’ici ! A cause de toi, les Juifs ne viennent plus faire leurs courses [à Nazareth] », a-t-il lancé.
Dans l’air du temps, la posture conciliante de ce maire s’inscrit dans le contexte plus large d’un rapprochement israélo-arabe, contenu dans les accords d’Abraham signés l’été dernier entre Israël, les Emirats arabes unis et Bahreïn, et, plus récemment, entre Israël et le Maroc, le tout avec l’aval de l’Arabie saoudite. Les Arabes d’Israël – 1 million sur une population totale de 9 millions d’habitants – observent plutôt d’un bon oeil cette période de « détente » qui ouvre, pensent-ils, des possibilités économiques nouvelles.
Le député Mansour Abbas, l’un des hommes politiques arabes les plus en vue d’Israël, affiche ainsi son soutien à la reconduction de Netanyahou au poste de Premier ministre. Du jamais vu.
« La tendance consiste à travailler pour le bien de la société arabe en Israël, quitte à collaborer avec un gouvernement de droite », a-t-il affirmé récemment. Le maire de Nazareth, lui, assure que l’électorat arabe « apportera au moins quatre ou cinq mandats de députés au Likoud lors des législatives du mois prochain ». Une petite révolution à l’aune de la vie politique israélienne. ✷