Amy Jo Burns, Fabienne Pascaud, Florence Aubenas
PAR AMY JO BURNS, TRAD. DE L’ANGLAIS (ÉTATS-UNIS) PAR HÉLOÏSE ESQUIÉ. SONATINE, 304 P., 21 €.
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Les montagnes de Virginie-Occidentale n’ont jamais constitué un environnement hospitalier pour les femmes. Celles dont les maris, malades, ne pouvaient descendre à la mine de charbon avaient le droit de s’approvisionner au magasin de la compagnie... à condition de payer de leur personne. Nombre de mines ont fermé, les opiacés ont inondé la vallée, mais, là-haut, les conditions de vie n’ont guère changé, et c’est pourquoi Ivy et Ruby, très jeunes, s’étaient juré de s’en extirper au plus tôt. C’était il y a seize ans. Aujourd’hui, Ivy élève trois garçons au côté d’un mari alcoolique, tandis que Ruby a épousé Briar Bird, alias OEil-Blanc, un pasteur qui tient ses ouailles sous son joug. Comment expliquer un tel renoncement ?
Les Appalaches ont récemment nourri l’inspiration de plusieurs romanciers – Taylor Brown (Les Dieux de Howl Mountain) ou Chris Offutt (Nuits appalaches) ont revisité ce versant de la mythologie américaine, ses trafiquants de whisky, ses paroissiens convaincus que tenir un crotale des bois à pleines mains est le meilleur moyen de prouver sa dévotion au Seigneur. Ces éléments sont présents dans le premier roman d’Amy Jo Burns, mais il a ceci de remarquable qu’il épouse le point de vue des femmes. C’est Wren, la fille de Ruby, 15 ans, qui narre la plupart des événements, découvre les secrets, les supercheries, et tente de trouver une voie pour survivre dans cet endroit hors du temps, somptueux et mortifère. L’écriture est ample, puissante, et la construction, merveilleuse d’intelligence, donne envie de reprendre au début une fois parvenu à la fin.