Les derniers bastions socialistes
Avec des approches différentes, la gauche a retrouvé le pouvoir au Danemark, au Portugal et en Espagne. Ailleurs, elle est en déclin… quand elle n’est pas hors-jeu.
Le 27 mai 1999, le Premier ministre français, Lionel Jospin, et ses homologues socialistes le Britannique Tony Blair et l’Allemand Gerhard Schröder s’affichent tout sourire lors d’une grandmesse politique au palais des sports de Paris. La social-démocratie triomphe. Elle est alors à la tête de 11 gouvernements sur les 15 que compte l’Union européenne. Aujourd’hui, la gauche ne dirige plus que 6 Etats membres sur 27. Et encore, sous des formes très bigarrées.
C’est en promettant d’être aussi fermes que la droite à l’égard des migrants que les sociaux-démocrates danois ont repris les rênes du pouvoir en 2019. « En 1980, 1 % des Danois étaient “non-occidentaux”, contre 8 % aujourd’hui », a déclaré Mette Frederiksen, un an avant d’être nommée Première ministre, pour justifier un plafonnement de leur accueil. « Cette rhétorique peut paraître étonnante pour d’autres socialistes européens, concède l’ancien président du parti SD Mogens Lykketoft. Mais cela nous a permis de reprendre des votes de cols bleus à l’extrême droite. » Pour le reste, Frederiksen promeut des réformes de gauche, avec la réintroduction d’un dispositif de préretraite pour les carrières longues et pénibles, ainsi qu’une revalorisation des budgets de l’éducation et de la santé. « Lorsque nous étions au pouvoir, entre 2011 et 2015, nous avons mené une politique de centre droit, contraints par nos alliés libéraux, ce qui a pu décevoir. Cette fois, ce n’est plus le cas », précise Mogens Lykketoft. A cela s’ajoute la gestion efficace de la crise sanitaire par l’actuelle dirigeante. Résultat : les sociaux-démocrates ont progressé dans les sondages. De bon augure pour les prochaines législatives, en 2023.
Malte mise à part – l’île aux 500 000 habitants dirigée par les travaillistes est un cas dont il est difficile de tirer des leçons –, les seules autres success stories socialistes du moment sont à chercher dans la péninsule Ibérique. Au Portugal, c’est à la faveur d’une alliance inédite avec l’extrême gauche que le Parti socialiste est revenu au pouvoir en 2015. Antonio Costa, le nouveau Premier ministre, a choisi de rompre avec le programme d’austérité imposé par la « troïka » (FMI, Commission et Banque centrale européennes) en augmentant les retraites et le salaire minimum. Mais il n’en oublie pas de redresser les comptes publics. Cette formule gagnante lui a valu d’être reconduit haut la main lors des élections de 2019. « A un moment où les partis sociaux-démocrates étaient considérés comme trop modérés ailleurs en Europe, il a renforcé le clivage gauche-droite »,