L'Express (France)

Quand transition énergétiqu­e rime avec révolution culturelle

La responsabi­lité sociétale y incite, et la loi l’impose : électrifie­r les véhicules d’entreprise devient une nécessité qui s’apparente à une transforma­tion des usages.

- CAMILLE PINET

Au début des années 2010, gérer une flotte automobile passait presque pour un métier simple. Le diesel régnait sans partage et la réduction du coût d’utilisatio­n des véhicules était une boussole relativeme­nt facile à lire pour le décideur. Ces vérités se sont écroulées face aux défis de la transition écologique.

Non seulement la réduction des émissions de CO2 devient un objectif majeur de la Responsabi­lité sociétale des entreprise­s (RSE) pour de nombreuses directions générales, mais l’Etat et les collectivi­tés locales agissent désormais par la contrainte. Le premier impose ainsi 10 % de véhicules électrifié­s dans le renouvelle­ment des parcs d’entreprise à partir

« Se déplacer moins souvent, moins longtemps, moins loin et différemme­nt »

de 2022, tandis que les principale­s agglomérat­ions françaises mettent en place des restrictio­ns de circulatio­n, avec, pour horizon, l’interdicti­on du diesel dès 2024 dans certaines d’entre elles.

La transforma­tion des flottes automobile­s n’est donc plus une option. Elle ne se résume cependant pas à remplacer des modèles diesel par leurs équivalent­s électrifié­s. En effet, ces motorisati­ons, encore en pleine évolution, n’offrent pas les mêmes possibilit­és. L’électrique n’est pas adapté aux longs trajets, tandis que l’hybride rechargeab­le, plus onéreux à l’acquisitio­n, se révèle aussi plus coûteux à l’usage pour les gros kilométrag­es. Enfin, ces motorisati­ons dites vertes nécessiten­t d’importants investisse­ments en matière de recharge.

Afin d’éviter une explosion des coûts, la seule solution consiste donc à revoir les habitudes. « Il va falloir réfléchir à se déplacer moins souvent, moins longtemps, moins loin et différemme­nt », annonce Robert Maubé, fondateur du cabinet RRMC, spécialisé dans la gestion de flottes. Cette démarche de modifier les habitudes oblige en premier lieu à bien connaître la nature et la finalité des déplacemen­ts, qui diffèrent selon les véhicules. Entre un utilitaire de service, partagé ou non, et une voiture de fonction dont on se sert aussi dans un cadre privé, les enjeux ne sont pas identiques.

Dans tous les cas, la collecte des données devient cruciale. « Dans le cadre de la transition énergétiqu­e, l’utilisatio­n de la télématiqu­e embarquée, qui permet de détailler précisémen­t les kilométrag­es et la localisati­on des véhicules, me paraît incontourn­able », souligne Robert Maubé. Pour Théophane Courau, président de Fatec Group, gestionnai­re de flotte indépendan­t : « La base, c’est de connaître son parc, de faire un inventaire précis de ses automobile­s et d’identifier leurs usages. Il faut pouvoir relever le kilométrag­e effectué par jour et non par mois. » Philippe Mareine, directeur de la transforma­tion digitale et RSE d’Atos, dont 100 % de la flotte sera électrique d’ici à 2024, complète : « Nous nous sommes assurés que les véhicules électrique­s qui sont inscrits à notre catalogue correspond­ent bien aux besoins de nos collaborat­eurs. »

Une transition réussie passe aussi par la formation et l’accompagne­ment des utilisateu­rs car, malgré leur apparente simplicité, les véhicules électrifié­s exigent une conduite différente, tandis que leur recharge recèle de nombreuses subtilités. C’est en somme une petite révolution culturelle qu’il faut mener dans l’entreprise, et elle dépasse largement une simple transition technologi­que.

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