La stratégie du dernier kilomètre triomphe au travail
Les vélos, trottinettes et scooters électriques en libre-service se multiplient en milieu urbain et s’intègrent dans la politique des entreprises.
Face à la congestion des villes et aux restrictions de circulation pour les voitures, la mobilité dite « douce » a désormais le vent en poupe. Pour le grand public, elle se matérialise déjà par les services de location de vélos, de scooters et de trottinettes à la minute. L’une des premières applications, le Vélib’ parisien, en a popularisé l’idée. Elle devient aussi un enjeu pour les entreprises et leurs salariés, car elle répond à un besoin bien précis, celui des déplacements des derniers kilomètres.
« On ne prend pas une trottinette pour parcourir 40 kilomètres. Mais son usage est pertinent pour relier deux rendez-vous clients dans le même quartier ou pour réaliser le trajet entre la station de métro et son lieu de travail, qui se trouve souvent à quinze minutes de marche dans certaines banlieues. Elle se révèle enfin adaptée pour des trajets à l’intérieur même de certains sites d’entreprise très étendus », précise Auriane Nirascou, directrice de Freenow for Business France, dont l’application inclut l’offre Tier, qui propose trottinettes et scooters électriques. Si ces derniers sont à la mode, ils restent les moins utilisés avec 269 000 trajets en France au mois de mars 2021, contre 958 000 pour les trottinettes et près de 5 millions pour le vélo, selon Fluctuo, start-up spécialisée dans la mobilité partagée. Julien Chamussy, son cofondateur, explique les raisons de cette hégémonie : « Le système de tarification du vélo en libre-service privilégie l’abonnement au paiement à l’acte, ce qui incite à l’usage. Par ailleurs, la plupart de ces offres sont subventionnées par les collectivités locales, ce qui les rend plus attractives financièrement. »
Le secteur de la mobilité en libre-service reste très mouvant avec de nombreux rachats et fusions d’opérateurs, mais aussi des créations de start-up qui parviennent à lever des fonds considérables. Tous s’intéressent de plus en plus aux entreprises, qui de leur côté trouvent là un moyen de recourir à ces véhicules pour leur stratégie de mobilité sans avoir à les acheter. « La crise sanitaire a accéléré le phénomène, car les opérateurs ont perdu la clientèle du tourisme et trouvent ainsi un moyen de compenser. Elles leur proposent des tarifs préférentiels, la possibilité d’intégrer la facturation à leur logiciel de RH, mais aussi la gestion du forfait de mobilités durables », poursuit Julien Chamussy.
Ces véhicules s’insèrent de plus en plus dans une logique multimodale, grâce à des applications dédiées comme MyVega, proposée par Veolia à ses salariés. Une première étape vers le fameux crédit mobilité envisagé par de nombreuses entreprises, qui remplacera la voiture de fonction par la prise en charge d’un éventail de solutions le plus large possible. Cet enjeu capital pour tous les acteurs du secteur explique pourquoi les loueurs, constructeurs automobiles ou prestataires de services s’intéressent tant à ces petits engins pourtant bien éloignés de leur coeur de métier.