Recomposition politique : après moi, le déluge
L’échiquier démocratique a besoin d’une majorité et d’une opposition.
Il est normal de vouloir gagner une élection, nationale ou locale. La politique, ce ne sont pas les Jeux olympiques, l’important n’est pas seulement de participer. Mais quel prix est-on prêt à payer ? La morale n’est certes pas toujours bonne conseillère, on peut néanmoins en tenir compte. En 1987, le ministre Michel Noir dit les choses à sa manière, dans une tribune publiée par Le Monde : « Serions-nous prêts à sacrifier notre âme pour ne pas perdre des élections ? […] La responsabilité d’un homme politique n’est pas seulement de gagner pour exercer le pouvoir. »
Cette fois, au nom d’intérêts forcément supérieurs, chacun a le nez sur le lendemain. Renaud Muselier pense d’abord à sa réélection à la tête de la région Sud (Paca) : en pactisant avec la majorité présidentielle, il veut tenter d’arriver en tête au soir du premier tour, le 20 juin, ce que les sondages ne lui garantissent pas, et priver ainsi l’extrême droite d’une dynamique pouvant la conduire au succès. Emmanuel Macron pense d’abord à sa réélection : en affaiblissant Les Républicains (LR), un adversaire dont il ne veut surtout pas faire un concurrent, il prépare lui aussi le premier tour de la présidentielle. Si ces calculs peuvent se révéler payants, qu’en est-il du coup d’après, du surlendemain ?
Ainsi va la politique. Chacun se met à son compte, Xavier Bertrand et Valérie Pécresse aussi, et LR aujourd’hui a perdu la moitié des présidents de région dont le parti célébrait la victoire il y a six ans. La recomposition n’a de sens que si elle n’oublie pas une évidence : l’échiquier politique a besoin d’une majorité et d’une opposition. A laisser au Rassemblement national le monopole de la seconde, on en fait l’alternative. Encore un instant, monsieur le bourreau.