Plan de relance européen : où va l’argent ?
Même si Bruxelles a posé ses conditions pour l’utilisation des fonds alloués, les programmes varient sensiblement d’un pays à l’autre.
Les 150 membres de la convention citoyenne pour le climat peuvent toujours se raccrocher à la formule de Talleyrand : « Quand je me regarde, je me désole, quand je me compare, je me console. » Certes, le référendum promis, en décembre dernier, par Emmanuel
Macron sur l’inscription de la lutte contre le dérèglement climatique dans l’article 1 de la Constitution a du plomb dans l’aile. Reste que l’effort de la France en faveur de la transition verte est peut-être plus important que celui de ses voisins européens. En tout cas en ce qui concerne l’utilisation et le fléchage des milliards d’euros provenant du plan de relance des Vingt-Sept.
Pour bénéficier des subventions du large programme « Next Generation EU », la Commission avait fixé ses conditions. Sur les quelque 340 milliards d’aides directes mises sur la table, chaque Etat membre devait s’engager à flécher 37 % des sommes octroyées vers la lutte contre le réchauffement climatique et 20 % vers la numérisation de l’économie. A partir de ce cadre, libre à chacun de faire plus.
Concrètement, où va l’argent ? Macron fait-il plus que Merkel ou Draghi sur la révolution verte ? Pour tenter de répondre à la question, les économistes du think tank Bruegel, à Bruxelles, ont passé au crible les programmes remis dernièrement à la Commission par l’Allemagne, la France, l’Italie mais aussi l’Espagne. « En matière d’utilisation des fonds, ces plans illustrent des philosophies et des priorités très différentes », explique Zsolt Darvas, l’un des auteurs de l’étude. Notamment des deux côtés du Rhin. Sur les 40 milliards de subventions que doit recevoir la France – et qui sont déjà inscrits dans les 100 milliards du plan de relance présenté en septembre dernier – la moitié est consacrée au climat, contre 40 % à peine en Allemagne ou encore en Italie.
A l’inverse, sur le volet numérique, Berlin met le paquet avec plus de 50 % de l’enveloppe fléchée vers la digitalisation de l’économie quand l’Hexagone respecte tout juste les recommandations de la Commission. Dans le détail de chaque catégorie, aussi, les choix sont différents. « Priorité au transport ferroviaire et à la rénovation énergétique des bâtiments à Paris ; priorité à l’hydrogène vert et aux stations de recharge électrique côté allemand », constate Zsolt Darvas.
Qui a raison et quel est le bon panachage ? « C’est extrêmement difficile de connaître exactement l’impact de tel ou tel choix d’investissement public sur la croissance potentielle d’un pays, » reconnaît l’économiste Patrick Artus. Une chose est certaine : le train européen ne repassera pas de sitôt.