Le Royaume-Uni, laboratoire d’idées d’Amazon
A Londres, le géant de l’e-commerce fait l’expérience d’un supermarché sans caisse et prévoit d’ouvrir un salon de coiffure high-tech.
Une petite révolution. Dans le quartier d’Ealing (ouest de Londres), Amazon teste depuis deux mois une nouvelle façon de faire ses courses. On entre dans ce supermarché « sans contact » en scannant un code téléchargé sur une application, on glisse les aliments dans son sac et on quitte les lieux sans passer à la caisse. L’expérience est tellement troublante que la supérette emploie deux vigiles pour vous confirmer que vous n’avez rien d’autre à faire en sortant. Quelques minutes plus tard, la facture apparaît sur votre smartphone. « Nous avons choisi Ealing, parce que c’est le genre d’endroit où la population fait ses courses localement et parce que le quartier est bien desservi par les transports », déclarait à la presse Matt Birch, directeur d’Amazon Fresh, le jour de l’ouverture. Depuis, deux autres points de vente ont vu le jour, en attendant un déploiement plus large.
Ouvrir un magasin en dur pendant une pandémie qui aura consacré le succès de l’ecommerce, voilà un sacré contrepied de la part d’Amazon ! Mais ce lieu d’un nouveau genre doit d’abord être considéré comme un laboratoire pour le négoce de demain. « L’avenir du commerce sera mixte. Nous, consommateurs, ne voulons pas uniquement faire nos courses en ligne, parce que ce n’est pas toujours commode, surtout dans l’alimentaire », analyse Natalie Berg, directrice du cabinet de conseil NBK Retail. Ce lieu est un moyen de peaufiner des technologies que le géant du numérique pourrait vendre à d’autres distributeurs, eux aussi intéressés par l’idée de supprimer l’attente en caisse.
Récemment, le groupe de Seattle a également révélé son projet d’ouvrir un salon de coiffure dans le quartier de Spitalfields, à l’est de la City. Le PDG d’Amazon, Jeff Bezos, se seraitil mis en tête de « disrupter » ce domaine ? Pas vraiment, à en croire Natalie Berg, pour qui il s’agit d’un autre laboratoire : « N’oublions pas qu’Amazon est davantage une entreprise de la tech que de la distribution. » Le public londonien pourra donc, en avantpremière, éprouver le point and learn, un système qui permet, en pointant un objet, de faire apparaître des informations à son sujet. Grâce à la réalité augmentée, le client pourra ainsi voir comment lui irait sa nouvelle coupe de cheveux.
Une stratégie d’Amazon pour partir à la conquête des marchés de la mode et de la beauté, de collecter encore davantage de données sur ses utilisateurs et de les inciter à rentrer dans le programme de fidélité Prime. Ses abonnés dépensent en moyenne 4 fois plus (1 600 dollars par an) que ceux qui ne le sont pas.
Le Brexit n’y change rien : le RoyaumeUni reste pour le mastodonte américain une plateforme où expérimenter ses innovations avant de les commercialiser dans le reste de l’Europe. « Quand Amazon veut déployer une idée, il le fait d’abord aux EtatsUnis, puis au RoyaumeUni. Ensuite, l’entreprise pense à la France ou à l’Allemagne », observe Miya Knights, analyste de la distribution et coauteure d’un livre sur le groupe de Jeff Bezos. Cette préférence ne s’explique pas uniquement par la proximité linguistique. Du fait d’une population importante, formée très tôt