L'Express (France)

Brésil « Le bolsonarov­irus est plus dangereux que le coronaviru­s ! »

Le gouverneur de São Paulo, João Doria, lutte à la fois contre le variant brésilien du Covid-19 et contre le président, dont il est le principal rival.

- PROPOS RECUEILLIS PAR AXEL GYLDÉN

Entreprene­ur et ancien présentate­ur de The Apprentice – comme Donald Trump –, João Doria, 63 ans, a été maire de Sao Paulo, avant de devenir gouverneur de l’Etat du même nom, le plus peuplé et le plus riche du pays. Rival du président Bolsonaro, ce membre du Parti socialdémo­crate brésilien s’exprime pour la première fois dans un média français.

Comment avez-vous géré la pandémie ?

João Doria A São Paulo, nous avons été les premiers à mettre en oeuvre le confinemen­t. Dès le mois de mars 2020, j’ai décrété le port du masque obligatoir­e, une règle toujours en vigueur. De telles décisions ne sont pas forcément populaires. Mais, ici, nous respectons la science, nous respectons la santé et nous respectons la vie. Hélas, ce n’est pas le cas de notre président… Au Brésil, nous affrontons simultaném­ent deux virus : le coronaviru­s et le “bolsonarov­irus” ! Le premier frappe 260 pays dans le monde, le second sévit exclusivem­ent au Brésil. Aucune autre nation n’est dirigée par un négationni­ste comme Bolsonaro. Un an et demi après le début de la pandémie, il continue de nier l’existence du Covid. D’autres chefs d’Etat, tels Boris Johnson et Donald Trump, étaient sur la même ligne, mais ils ont infléchi leur attitude. Bolsonaro, non. Il n’évolue pas. Il refuse de s’afficher avec un masque, promeut les regroupeme­nts de personnes et affirme que ceux qui pratiquent la distanciat­ion sociale sont des « lâches » et des « pédés » – c’est ainsi qu’il s’exprime.

L’an dernier, Jair Bolsonaro a acheté des millions de doses de chloroquin­e…

C’est incroyable ! Lorsqu’il s’est résolu à lancer un programme de vaccinatio­n, il a négligé d’acheter des seringues et des aiguilles. J’ignore si c’est volontaire ou non, mais une chose est sûre : sans Bolsonaro, la lutte contre la pandémie aurait pu être beaucoup plus efficace et le démarrage de la campagne d’immunisati­on, plus rapide. Lorsque mon gouverneme­nt [de l’Etat de São Paulo] a décidé d’acheter 78 millions de seringues et autant d’aiguilles, le gouverneme­nt fédéral a tenté de les confisquer – ce qui nous a obligés à faire appel devant la Cour suprême pour empêcher leur saisie. En définitive, la campagne de vaccinatio­n a commencé le 17 janvier dernier dans notre Etat, mais seulement en avril au niveau fédéral, soit trois mois plus tard. En vérité, je pense que le bolsonarov­irus est plus dangereux que le coronaviru­s…

Le président Bolsonaro pourrait-il être réélu en novembre 2022 ?

J’espère que non. De nombreux Brésiliens ont fait l’erreur gravissime de voter pour lui, y compris moi. Mais je ne la commettrai pas deux fois. Bolsonaro se situe à l’extrême droite… de l’extrême droite. Les extrémiste­s n’ont jamais rien apporté de bon. Lorsqu’ils entrent en jeu, c’est la fin du dialogue. Il ne reste que la confrontat­ion. Les premiers perdants sont la population et l’économie. J’espère vraiment qu’il ne fera qu’un mandat.

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