Après la Lune et Mars, tous à l’assaut de Vénus
Trois missions vont être envoyées vers cette planète considérée comme la soeur de la Terre.
Elles sont des soeurs jumelles nées, non pas sous le signe des Gémeaux, mais sous celui du Soleil. La Terre et Vénus se ressemblaient tellement : leurs masse, taille, densité et orbite sont en effet similaires. Elles ont pourtant connu des destins radicalement opposés. La planète bleue offre des conditions propices à la vie lorsque « l’étoile du Berger » est un enfer : absence d’eau, températures dantesques (environ 460 °C), atmosphère oppressante (la pression ambiante est 93 fois supérieure à la nôtre), pluies d’acide sulfurique. Sans oublier la rotation rétrograde (« à l’envers » par rapport à notre planète) à une vitesse d’escargot : une journée vénusienne équivaut à... 243 jours chez nous. Bonjour tristesse, bonjour l’ennui !
De nombreux scientifiques croient pourtant que Vénus a pu abriter à sa surface des océans d’eau liquide et donc, peut-être, des formes de vie. Comment expliquer, alors, que ces deux soeurs ont eu des histoires si différentes ? Jamais nous n’avons été aussi près d’avoir des réponses... Car la deuxième planète du système solaire (en distance par rapport à son étoile) sera la star du début de la décennie 2030. L’Agence spatiale américaine (Nasa) a ainsi annoncé l’envoi de deux missions, Davinci+ (Deep Atmosphere Venus Investigation Noble gases Chemistry and Imaging) et Veritas (Venus, Radio Science Insar Topography and Spectrocopie), dans le cadre de son programme Discovery, pour des montants d’environ 600 millions de dollars chacune. Lancées en 2028 et 2030, elles commenceront leur travail scientifique après 2030.
L’Agence spatiale européenne (ESA) vient de faire de même avec la validation de la mission EnVision (610 millions d’euros), qui, elle, devrait être opérationnelle en 2035. « C’est une incroyable conjonction organisée par les deux agences spatiales après trente ans de disette », s’enthousiasme Thomas Widemann, chercheur à l’Observatoire de Paris-PSL et maître de conférences à l’université Versailles Saint-Quentin. Pour l’astrophysicien, Programme Manager de la mission EnVision et qui fait aussi partie de l’équipe Veritas, il n’y a pas de doublon : « Ces missions sont complémentaires même si toutes ont pour objectif de connaître enfin le passé de Vénus. »
De prime abord, cette dernière possède une surface bien plus jeune que celle de la Terre (500 millions d’années contre 3 à 4 milliards d’années). Pour autant, les chercheurs ne sont pas encore parvenus à détecter de trace d’activité géologique récente. « C’est une affaire de résolution. Nos dernières images du sol remontent aux sondes Viking et Magellan, lancées respectivement dans les années 1970 et fin 1980, qui permettent de le voir trouble, un peu comme le fond d’une piscine », explique Thomas Widemann. Avec les sondes Veritas et EnVision, les scientifiques disposeront enfin d’une vision plus précise.
Les astrophysiciens espèrent observer une éruption ou apercevoir des zones de subduction
La première effectuera une cartographie exhaustive de Vénus avec une résolution de 15 à 30 mètres. La deuxième se focalisera sur près de 30 % de la surface de la planète – à savoir les régions les plus tourmentées d’un point de vue géologique (montagne, rift, etc.) –, avec une meilleure précision : 10 mètres. S’ils croient à une tectonique active, les astrophysiciens espèrent mieux caractériser les flux de chaleur à la surface et, pourquoi pas, observer une éruption volcanique ou apercevoir des zones de subduction. La troisième sonde, Davinci+ se concentrera, elle, sur l’atmosphère. Un spectromètre de masse analysera sa composition en matière de gaz, ce qui permettra de mieux connaître l’histoire de l’eau et de savoir s’il s’agit d’une atmosphère primitive. Le pronostic de Thomas Widemann ? « Nous allons faire des découvertes que nous n’imaginions même pas. »