Un booster de technologie ?
Dans leur rapport remis à Emmanuel Macron, les économistes Olivier Blanchard et Jean Tirole préconisent de créer en Europe l’équivalent de la Darpa
américaine. « La Defense Advanced Research Projects Agency a joué un rôle central dans le développement de technologies aujourd’hui incontournables, telles que le GPS ou l’Internet, en allouant des fonds au secteur privé, aux universités et aux laboratoires publics, avec un grand pouvoir discrétionnaire (permis par son indépendance vis-à-vis de la politique et des groupes de pression), et en assurant un suivi rigoureux des projets et de leur aboutissement », écrivent les deux auteurs.
La Darpa investit dans des domaines avancés, jugés trop risqués pour le secteur privé, mais au potentiel immense. Cette année, 3,5 milliards de dollars vont irriguer tout le système de recherche américain. Chaque programme est surveillé au plus près par un responsable de projet disposant de toute l’autorité nécessaire pour interrompre ou réorienter des travaux engagés dans une mauvaise direction. Les bénéfices ont été gigantesques pour la science et la technologie américaines.
Comment dupliquer cette organisation sur le Vieux Continent ? Il existe déjà une entité qui pourrait être un noyau prometteur : le Joint European Disruptive Initiative (Jedi). Cette structure se présente comme la Darpa européenne (sans le D de Defense).
Son fondateur, André Loesekrug-Pietri, passé par Supaero, HEC et Harvard, a tissé un vaste réseau de scientifiques, d’entrepreneurs et de cadres dirigeants désireux de créer ce modèle.
Mais la tâche est rude. D’abord, estime le fondateur du Jedi, il faut créer une entité indépendante de la bureaucratie européenne ; ensuite, la clef du système est la perméabilité entre l’agence en question, les milieux académiques et les laboratoires, publics comme privés. Enfin, il y a le sujet du budget :
« Avec 200 millions d’euros, on peut déjà lancer un grand nombre de projets qui feront la différence », note André Loesekrug-Pietri. Une somme modeste à l’échelle des Vingt-Sept, mais plus que jamais nécessaire au regard de la compétition internationale. Frédéric Filloux est éditeur de la « Monday Note »