L'Express (France)

Nicolas Dupont-Aignan veut devenir le rempart contre « l’oligarchie »

Soutien du FN en 2017, le souveraini­ste, affaibli par des départs, souhaite être l’alternativ­e au duel Macron-Le Pen, quitte à négocier avec Les Républicai­ns.

- MARYLOU MAGAL

Dans la course à la présidenti­elle, chaque camp avance ses pions, et ceux de Nicolas Dupont-Aignan sont à bascule. Tantôt soutien de Marine Le Pen, tantôt négociant avec Les Républicai­ns (LR), le souveraini­ste joue des épaules pour se frayer un chemin sur la route de l’Elysée. Lors de ses université­s d’été, les 3 et 4 juillet, il a donné le ton de sa campagne présidenti­elle à venir, multiplian­t les attaques contre « l’oligarchie », la « partialité des médias » et se posant en défenseur des « libertés individuel­les, qui n’ont jamais été si menacées ». Pour faire connaître ses propositio­ns, il dépêchera, cet été, des militants qui entameront un porte-à-porte par départemen­t. « Nos concitoyen­s sont écoeurés par la parole politique et seule cette démarche peut être productive », revendique le député de l’Essonne.

Alors, qu’importent les sondages, où il oscille entre 4 % et 5 % des intentions de vote… Devant les journalist­es et les adhérents de son mouvement, il assure qu’il fera mentir les pronostics, qu’il sera l’alternativ­e au duel Macron-Le Pen. Pourtant, depuis 2017, Debout la France a rencontré quelques perturbati­ons : en décembre 2020, plus d’une cinquantai­ne de cadres en ont déserté les rangs pour se rallier à Marine Le Pen. Un épisode minimisé par Nicolas DupontAign­an, qui balaie une « rumeur totalement fausse » et évoque « le départ de deux personnes sans incidence sur le parti ». « Nous comptons plus de 10 000 adhérents et 95 fédération­s sur le territoire », insiste-t-il, pointant du doigt « l’influence » de son mouvement sur les réseaux sociaux, dont les pages Facebook caracolent en tête, en termes d’interactio­ns, principale­ment grâce à des vidéos liées au Covid.

Mais, parmi ses anciens compagnons, le constat diffère. « Debout la France est devenu un parti fantôme, et le turnover des cadres est terrible, glisse l’un des démissionn­aires. Il n’y a plus de constance sur la ligne, ce n’est plus qu’une boutique qui lui permet de gagner sa vie. » On reproche au souveraini­ste ses revirement­s politiques. D’abord soutien de Marine Le Pen en 2017, il endosse aujourd’hui le costume d’opposant. « Avoir soutenu le FN ne m’empêche pas d’être candidat, dans la mesure où j’estime que je suis meilleur que Marine Le Pen », affirme Nicolas Dupont-Aignan. Il ne voit d’ailleurs pas de problème, non plus, dans la signature d’un accord avec LR

« J’ai toujours prôné l’union et je continuera­i de tendre la main à tous »

pour les élections régionales, qui va, pour certains, à l’encontre des conviction­s profondes du mouvement. « Il n’y a aucun changement de ligne, coupe-t-il court. J’ai toujours prôné l’union, et je continuera­i de tendre la main à tous, qu’ils viennent du RN ou de LR. » « Il renonce à ce qui a fait l’originalit­é de Debout la France et il est en train de devenir une caution souveraini­ste pour LR », commente un ancien allié. « Il négocie une paix des braves, pour que LR le laisse tranquille afin qu’il soit réélu député de Yerres, car c’est la seule chose qui lui importe », analyse un ancien bras droit, pour qui la course à la présidenti­elle de Nicolas Dupont-Aignan n’est qu’un leurre destiné à ses soutiens et militants. « Il a déjà prévenu ses équipes qu’il n’obtiendrai­t peut-être pas toutes les signatures », abonde un cadre RN.

D’autant qu’une nouvelle embûche surgit sur la route du souveraini­ste : la potentiell­e candidatur­e d’Eric Zemmour. « S’il se présente, cela va forcément le handicaper, analyse Laurent Jacobelli, son ancien porte-parole. Ils ont le même électorat : ceux qui veulent voter RN mais n’assument pas. » L’intéressé, quant à lui, écarte une fois encore toute difficulté : « Je suis suffisamme­nt attaché à ma liberté pour ne pas critiquer une candidatur­e, commente-t-il. Je propose un projet, une personnali­té, les Français choisiront. » « Nicolas Dupont-Aignan subit la malédictio­n des souveraini­stes de droite : au croisement des chemins entre la rupture totale et l’assimilati­on, il n’a pas su choisir et se fera devancer par une personnali­té plus talentueus­e que lui », conclut un ancien allié. Le risque est fort, à trop vouloir placer ses pions, de se les faire prendre. ✷

 ??  ?? Conférence de presse au côté de Marine Le Pen, avant le second tour de l’élection présidenti­elle, le 29 avril 2017.
Conférence de presse au côté de Marine Le Pen, avant le second tour de l’élection présidenti­elle, le 29 avril 2017.

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