PAR FRÉDÉRIC PIE. EDITONS NAUTILUS, 484 P., 22 €.
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14,7 kilos : le poids de la liberté pour Frédéric Pie en 2018. A 53 ans, cet entrepreneur du monde du numérique et de la haute technologie (Pictoris Interactive, Vodeo, Hubee) décide de se délester de tout, sociétés, appartement, voiture, pour ne garder que l’essentiel et partir, sac à dos, se métamorphoser au bout du monde. Sous les auspices de Pablo Neruda (« C’est pourquoi, Messieurs, je m’en vais./ Je dois écouter tumultueusement. »), le voilà, « Gitan de luxe », en Nouvelle-Calédonie, première étape d’une longue plongée dans les eaux profondes de la vie. Il s’y emploie avec bonheur, délaissant sans douleur apparente ses oripeaux de citadin affairé. Dans les moments de doute, Frédéric Pie se rabat sur ses chers consolateurs : Baudelaire, Flaubert, Char, Pessoa, Bobin, Goffette, Cioran (« Nous vivons tous au fond d’un enfer dont chaque instant est un miracle »).
Nouvelle-Zélande, Australie, Mexique, Guatemala, Honduras, Equateur, Pérou, Chili, Argentine... les pays défilent, des rencontres se nouent, les moments de pur bonheur se multiplient, tels ce ballet de milliers d’oiseaux dans la forêt amazonienne, un défilé de bernard-l’ermite dans un parc national costaricain ou le road trip mexicain en compagnie de son fils. Evidemment, les galères sont aussi au rendez-vous, consignées avec humour par notre écrivain-voyageur. Ainsi de l’expédition sans fin, debout dans un autocar guatémaltèque bringuebalant ; de la traversée, trempé et transi, des hauts plateaux andins aux commandes d’une Kawasaki 650, ou encore des tracasseries kafkaïennes pour faire passer ladite moto au Chili… On ressort de ce carnet de bord grand format vaguement jaloux et quasi prêt à remplir son sac à dos.