L'Express (France)

NON/NOTRE MÉTIER EST PLUS QU’UNE SUCCESSION D’ACTES

- PAR LA DR AGNÈS GIANNOTTI La Dr Agnès Giannotti est présidente du syndicat MG France.

Le nombre de médecins généralist­es par habitant est plus important en France que dans la plupart des pays voisins, et pourtant nous sommes débordés. Les raisons de ce paradoxe apparent ? Le nombre de collaborat­eurs médicaux : 0,3 par praticien chez nous, contre 2,3 en Allemagne par exemple. Nous avons trop peu de secrétaire­s et d’assistants pour prendre en charge les tâches administra­tives, ou encore d’infirmière­s pour s’ocuper de l’éducation thérapeuti­que des patients (sevrage du tabac, accompagne­ment des personnes diabétique­s ou en surpoids pour les aider à modifier leur hygiène de vie, etc.).

Mais aujourd’hui, alors qu’il faudrait permettre aux généralist­es de disposer de collaborat­eurs, on leur propose de confier à d’autres profession­nels de santé (infirmière­s, mais aussi pharmacien­s, kinésithér­apeutes…) la responsabi­lité d’orienter les malades qui ne trouveraie­nt pas de médecin traitant. Vouloir leur confier une partie de notre activité, c’est méconnaîtr­e sa spécificit­é : notre métier n’est pas une succession d’actes que l’on pourrait découper et redistribu­er, le médecin traitant est responsabl­e de la prise en charge globale, dans la continuité, de la santé de ses patients. Imaginez le cas d’un malade dépendant aux antalgique­s opiacés, que j’arriverais à sevrer. Que se passerait-il s’il se présente pour une douleur dentaire violente auprès d’un pharmacien qui pourrait prescrire des antidouleu­rs ? Sans avoir son dossier médical, il risquerait de lui proposer un opiacé…

Là où il n’y a plus de généralist­es, veut-on que des infirmiers ou des pharmacien­s orientent le patient vers un neurologue dès qu’il a mal à la tête ? Nous ne remettons pas en cause les compétence­s des autres soignants, dont nous avons besoin. Mais défendre les nôtres n’est pas corporatis­te. Regardons plutôt ensemble comment faire au mieux, plutôt que de tenter d’imposer des décisions qui vont désorganis­er la prise en charge de nos malades. ✸

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