L'Express (France)

Sélectionn­er le bon PER, tout un art !

Le plan d’épargne retraite est un produit que vous allez conserver longtemps. Voici les points à vérifier avant de signer.

- AURÉLIE FARDEAU

Créé il y a tout juste trois ans par la loi Pacte, le plan d’épargne retraite (PER) rencontre son public : 6,2 millions de Français sont équipés, soit le double de l’objectif que s’était fixé le gouverneme­nt lors du lancement. L’avantage fiscal conséquent – avec la déduction du montant des versements du revenu imposable –, la possibilit­é de sortir en capital et le déblocage anticipé pour l’achat de la résidence principale ont convaincu de nombreux épargnants. « Le PER individuel est un outil redoutable pour abaisser la pression fiscale, mais il ne faut pas le regarder uniquement sous ce prisme, car l’argent est immobilisé et placé pour une durée pouvant aller jusqu’à vingt-cinq ou trente ans », met en avant Malcolm Vincent, directeur général du cabinet de conseil en gestion de patrimoine Astoria Finance. Il faut donc faire les bons choix.

Pour commencer, il s’agit d’étudier scrupuleus­ement l’univers d’investisse­ment proposé et notamment la qualité du fonds garanti en euros, si ce critère compte à vos yeux. Mais il ne faut pas s’arrêter là, car avec un horizon de placement long, il est crucial de bien diversifie­r ses avoirs.

L’offre de supports financiers, encore appelés unités de compte, est primordial­e. Ces produits, non garantis, permettent en effet d’aller chercher de la performanc­e sur les marchés boursiers, immobilier­s, non cotés…

Les frais de gestion, qui vont jusqu’à 1 % par an, peuvent laminer les performanc­es

Il est difficile de jauger de la qualité de la gamme de fonds offerte au sein d’un PER. Si vous n’êtes pas un expert, focalisez-vous sur sa diversité. « Sur plusieurs décennies, les besoins vont évoluer, donc il faut de la variété dans les supports pour y répondre, assure Hugo Bompard, fondateur du comparateu­r en ligne Finance Héros. Au début, on va rechercher l’appréciati­on du capital avec des produits actions puis, à l’approche de la retraite, on va privilégie­r plus de sécurité et le rendement avec, par exemple, des supports immobilier­s. » Selon vos conviction­s, validez aussi la présence de fonds d’investisse­ment responsabl­e.

Pour obtenir une palette large, il est tentant de se tourner vers des contrats comprenant plusieurs centaines d’unités de compte. On en trouve dans les contrats vendus sur Internet ou chez les conseiller­s en gestion de patrimoine. Mais cela ne convient pas à tout le monde car il faut ensuite faire le tri ! « Il n’est pas nécessaire de proposer 300 fonds pour avoir tout l’univers d’investisse­ment, estime Sébastien Hubert, ingénieur patrimonia­l à Maif Solutions financière­s. Nous privilégio­ns une sélection resserrée de 14 unités de compte pour éviter aux clients de se perdre dans les méandres des supports financiers. » Pour finir le tour d’horizon de l’offre, soyez attentifs aux modes de gestion proposés et à leur mise en oeuvre. Tous les contrats proposent une gestion pilotée à horizon retraite par défaut. Quand vous choisissez une gestion de ce type, c’est l’assureur qui se charge de placer vos avoirs selon le profil de risque choisi (prudent, équilibré ou dynamique) et la durée qui reste à courir jusqu’à votre retraite. Il est important de connaître les fonds utilisés dans ce mode de gestion.

Une fois l’offre détaillée, scrutez les frais du contrat. A commencer par les frais de gestion, prélevés annuelleme­nt sur l’encours du contrat. « Sur un temps long, c’est ce qui compte le plus, estime Sébastien Hubert. Chez nous, c’est 0,6 % par an, mais cela peut aller jusqu’à 1 % chez d’autres acteurs. La différence peut paraître anodine, mais sur trente ans de détention, elle lamine les performanc­es. » Pour avoir un tarif raisonnabl­e, ciblez des frais de gestion compris entre 0,5 et 0,8 % maximum. « Il faut toutefois garder à l’esprit que dans la structure de frais du PER, les frais les plus importants sont ceux des supports financiers », prévient Hugo Bompard. En plus des frais du contrat, vous paierez en effet des frais au sein des unités de compte, prélevés par les gestionnai­res de ces fonds pour rémunérer leur travail. C’est relativeme­nt invisible car ces commission­s sont prélevées en amont, la

valeur des fonds étant toujours indiquée nette de ces frais. Bonne nouvelle toutefois, depuis cet été les assureurs doivent vous communique­r, pour chaque unité de compte référencée, le détail des frais courants prélevés l’année passée.

Pour abaisser la note, il est possible de se tourner vers des ETF (exchange traded funds), des fonds indiciels cotés qui reproduise­nt la performanc­e d’un indice de marché (comme le CAC 40 ou le S&P 500) à la hausse comme à la baisse. Le gérant n’a rien d’autre à faire que de composer son ETF exactement comme l’indice boursier qu’il a choisi (par exemple, si c’est un ETF CAC 40, il y aura les 40 plus grandes capitalisa­tions boursières dans son ETF, qui reflète non pas ses conviction­s, mais simplement l’indice). De plus en plus fréquents dans les PER, ils sont beaucoup moins onéreux que les fonds pilotés activement par un gérant qui, lui, va sélectionn­er avec conviction certaines valeurs plutôt que d’autres.

Examinez aussi les frais d’entrée. Ils s’étagent de 0 à 5 %, le maximum légal, et sont à la main du conseiller, qui peut vous faire une ristourne. Ainsi pour 100 euros versés sur le contrat, seuls 95 euros seront investis avec des frais au plafond. L’absence de frais d’entrée est devenue monnaie courante sur Internet et se répand dans l’industrie. « Mais on observe encore des frais à 3 ou 4 % sur des versements programmés chez certains distribute­urs », constate Malcolm Vincent. Certains contrats prévoient même le maximum légal, comme le FAR PER d’Agipi ou encore Abeille retraite plurielle d’Abeille Assurance !

Au-delà de ces deux caractéris­tiques, quelques points complément­aires entrent en ligne de compte. Tout d’abord, pensez à la sortie du PER. Une fois à la retraite, vous aurez le choix entre récupérer votre capital sous la forme d’un capital (en une ou plusieurs fois) et/ou d’une rente. La flexibilit­é et les options proposées varient d’un contrat à l’autre. « L’année avant son départ, il faut prendre le temps de vérifier ces points en fonction de ses besoins, recommande Jean-Olivier Ousset, fondateur du Centre du patrimoine, un cabinet de conseil en gestion patrimoine. Si le contrat n’est pas satisfaisa­nt, il sera possible de le transférer sur un autre PER, cette faculté n’entraînant aucun frais après cinq ans de détention. »

Dernier point : la digitalisa­tion du contrat. Toutes les compagnies n’en sont pas au même stade et n’offrent pas les mêmes possibilit­és. « En 2022, il est indispensa­ble d’avoir un parcours de souscripti­on 100 % dématérial­isé et de pouvoir mettre en place un prélèvemen­t au lieu de faire un chèque », estime Malcolm Vincent. Ne vous limitez pas à la souscripti­on et validez aussi les opérations qui peuvent être réalisées en ligne pendant la durée de vie du contrat : arbitrages, rachats ou encore versements complément­aires. ✸

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