FEMMES BOURREAUX
PAr bArbArA NeCeK. GrASSeT, 301 P., 20,90 €.
Qui est la plus abjecte ? Maria Mandl, « la bête d’Auschwitz-Birkenau » (exécutée en 1948 à 36 ans), Irma Grese, « la hyène de Belsen » (pendue à 22 ans en 1945) ou Hermine Braunsteiner, « la terreur de Majdanek », condamnée à la perpétuité en 1981 après s’être cachée aux Etats-Unis, puis libérée en 1996 trois ans avant sa mort ? La réponse à cette impossible question se trouve dans Femmes bourreaux, ouvrage saisissant qui revisite l’histoire des camps de concentration sous l’angle, inexploré en France, des tortionnaires au féminin. La première prison pour femmes du régime nazi ouvre ses portes dans une bâtisse de Moringen, une bourgade en Basse-Saxe, et il faut des femmes pour l’administrer. Moringen est remplacé en 1937 par le sinistre château de Lichtenburg, sur le bord de l’Elbe, et à partir de 1938 par le premier camp de concentration pour femmes à Ravensbrück, à 80 kilomètres de Berlin.
Cet enfer où mourront des dizaines de milliers de prisonnières est aussi le centre de formation de toutes les gardiennes allemandes – 4 000 au total. Pour ces dernières, cet emploi représente une « formidable ascension sociale », avec un salaire alléchant, des logements décents et un uniforme. Beaucoup d’entre elles « ont l’impression d’être devenues quelqu’un », écrit l’auteure, spécialiste du nazisme. Ce « quelqu’un », ce sont des créatures monstrueuses et l’incarnation du mal dans sa banalité. « Sans pitié, elles sont probablement encore plus dangereuses que les bourreaux SS car ce sont des femmes », témoignera une rescapée de Lichtenburg. Et une survivante d’Auschwitz ajoute : « Perfides, elles savaient où frapper d’autres femmes pour infliger un maximum de douleur. »