L'Express (France)

LE MALI AUX MAINS DES DJIHADISTE­S

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Novembre 2024. Le drapeau noir des djihadiste­s flotte sur Kati, la ville de garnison où réside le président de la junte malienne, Assimi Goïta. Le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), filiale d’Al-Qaeda, l’a capturé et file maintenant vers Bamako, à 15 kilomètres de là. Le pouvoir malien, très anti-français depuis le coup d’Etat de 2020, se refuse à demander de l’aide. « Il serait très surprenant que la junte fasse appel à la France », constate Djenabou Cissé, chercheuse à la Fondation pour la recherche stratégiqu­e. Cette spécialist­e du Sahel ne juge « pas impensable » une « prise de pouvoir du GSIM », qui, à son sens, « dispose de soutiens locaux et d’une forte influence politique ».

Le lendemain, le GSIM pénètre dans le palais présidenti­el de Koulouba, malgré la présence de la milice Wagner, dépassée. « Dans ce cas, on évacuerait nos ressortiss­ants », prévient le général Bertrand RactMadoux, ex-chef d’état-major de l’armée de terre et directeur de cabinet de la DGSE. Le 24 novembre, Iyad Ag Ghali, leader historique du GSIM, proclame le califat du Mali. Il prononce un discours dans lequel il « maudit l’Occident » et appelle à « poursuivre le djihad ». Une éventuelle interventi­on française est rapidement écartée : le gouverneme­nt n’a reçu aucun appel en ce sens et toute demande à l’ONU se verrait opposer le veto de la Russie.

Entre le 30 novembre et le 20 décembre 2024, des attentats ont lieu à Abidjan (Côte d’Ivoire), au sud du Niger et au Sénégal. « Si on le lui demande, la France interviend­rait certaineme­nt en mettant en place des cordons sanitaires aux frontières avec le Mali, tout en soutenant les poches de résistance maliennes », estime Djenabou Cissé. Plus de 2 000 soldats français se pressent alors aux frontières maliennes du Sénégal, de la Côte d’Ivoire et du Niger. Le 15 janvier 2025, Ouagadougo­u, la capitale du Burkina Faso, tombe à son tour aux mains du GSIM. Puis, les terroriste­s annoncent vouloir s’étendre vers le Togo et le Bénin. « Si la zone sahélienne devient un sanctuaire djihadiste, le risque est qu’elle attire des combattant­s, comme Daech il y a quelques années », prévient Elie Tenenbaum, directeur du centre des études de sécurité de l’Institut français des relations internatio­nales. Comme en 2015, une importante vague migratoire afflue depuis la mer Méditerran­ée. Les services de renseignem­ent craignent que des terroriste­s se mêlent aux réfugiés. « Afin de provoquer une crise, notamment en France, on pourrait même imaginer qu’Evgueni Prigojine, le patron de Wagner, ou quelqu’un de comparable, finance des réseaux de passeurs afin de créer un mouvement d’émigration de grande ampleur vers l’Europe », note même l’amiral Pascal Ausseur, directeur de la Fondation méditerran­éenne d’études stratégiqu­es. ✸

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