L'Express (France)

Crédit immobilier : les banques sont de retour

A l’affût de clients dans un marché très calme, les établissem­ents bancaires baissent leurs taux d’emprunt pour séduire les meilleurs profils.

- PAR AGNÈS LAMBERT

Les taux des crédits immobilier­s reculent enfin! En moyenne, à vingt ans, ils s’établissai­ent à 3,9 % début avril, d’après le courtier Meilleurta­ux, contre 4,35 % en novembre 2023, au pic du phénomène. « Le recul observé depuis le début de l’année se confirme, avec des barèmes en baisse de 0,15 point en moyenne par rapport à mars, selon les profils et les durées », note Maël Bernier, la porte-parole de Meilleurta­ux. C’est un vrai bol d’air pour les emprunteur­s : ils économisen­t 11 104 euros sur le coût total d’un crédit de 200 000 euros sur vingt ans, hors assurances, par rapport à novembre.

Ce n’est pas la seule bonne nouvelle : la concurrenc­e joue désormais à plein, alors que certains réseaux ne prêtaient plus l’an dernier. Ils sont tous de retour sur le marché grâce au repli de l’emprunt d’Etat français – l’obligation assimilabl­e du Trésor (OAT) – à dix ans, le point de référence utilisé pour fixer le coût du crédit. L’OAT s’est installée sous le seuil des 3 % depuis le début de l’année, contre 3,5 % à l’automne, incitant les banques à relancer cette activité dans de bonnes conditions. « Il faut entre 1 point et 1,5 point d’écart entre l’OAT dix ans et le taux d’un crédit immobilier pour que la banque dégage une marge », indique Cécile Roquelaure, directrice des études d’Empruntis.

La balle est désormais dans le camp des emprunteur­s. « Pour les acheteurs situés dans leur coeur de cible, certains établissem­ents sont prêts à proposer des décotes de l’ordre de 0,2 à 0,4 % par rapport au barème affiché », constate Sandrine Allonier, porte-parole de Vousfinanc­er. Les couples de primo-accédants en début de carrières prometteus­es ou encore les profession­s libérales ont donc les cartes en main pour obtenir une ristourne.

Le marché sort enfin de sa torpeur. Il était temps : la production de crédit à l’habitat pour les particulie­rs, hors renégociat­ion, se limite à 118 milliards d’euros sur un an à la fin de février 2024, d’après la Banque de France, contre plus de 200 milliards d’euros en 2021 et 2022. « C’est le bon moment pour acheter, car, le marché immobilier étant calme, les acquéreurs peuvent négocier non seulement le prix du bien mais aussi le taux de leur crédit », complète Sandrine Allonier.

Cette nouvelle donne n’empêche pas les banques d’être précaution­neuses : les emprunteur­s doivent respecter le sacrosaint taux d’endettemen­t maximal de 35 %, fixé par le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF). Les établissem­ents ont certes le droit de déroger à ce critère à hauteur de 20 % de leur production de crédit, mais ils ne se servent pas à plein de cette marge de manoeuvre. « Ils préfèrent éviter d’utiliser cette dérogation, car elle est compliquée à gérer », confirme Caroline Arnould, directrice générale de Cafpi. Le député (Renaissanc­e) Lionel Causse a d’ailleurs déposé une propositio­n de loi permettant d’assouplir les règles du HCSF, qui sera examinée par l’Assemblée le 29 avril.

Autre nouveauté, les primo-accédants sans apport peuvent désormais accéder au financemen­t, alors qu’ils trouvaient porte close l’an dernier. « C’est faisable en province, dans des régions où les prix de l’immobilier ne se sont pas envolés ces dernières années, car le risque de baisse de prix est dans ce cas limité », précise Cécile Roquelaure, d’Empruntis. Il s’agit pour les prêteurs d’éviter qu’en cas de revente très rapide du bien, à la suite d’une séparation ou d’une mutation profession­nelle, le prix ne couvre pas le capital restant à rembourser si le marché s’est dégradé.

La décrue des taux des crédits devrait se poursuivre les prochains mois, dans un contexte de détente des taux directeurs de la Banque centrale européenne, anticipée à partir du mois de juin. « Le taux moyen des crédits sur vingt ans devrait se situer entre 3 % et 3,3 % à la fin de l’année, soit 1 point de moins que fin 2023 », anticipe Caroline Arnould. Cela donnera encore un

peu plus de pouvoir d’achat aux emprunteur­s. Ainsi, une mensualité de 1 000 euros, hors assurances, permettra, dans quelques mois, d’emprunter 180 000 euros à 3 %, contre seulement 160 000 euros en novembre 2023 à 4,35 %. « Ceux ayant emprunté au plus haut pourront alors réfléchir à renégocier leur crédit », ajoute la directrice générale de Cafpi. Il faut en effet un différenti­el de 1 point entre l’ancien et le nouveau taux pour que l’opération soit rentable. ✸

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