A la Chimotaie, « le personnel est épuisé et les résidents en danger »
A la Chimotaie à Cugand, le personnel de l’Ehpad (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) a suivi le mot d’ordre national en débrayant 1 h 30 mardi dernier, en fin de matinée. Une mobilisation pour dénoncer le manque de moyens alloué par l’Etat à ces établissements.
Cugand. Initiée par la vingtaine d’aides-soignantes et les aides médico- psychologiques (AMP) de cet établissement appartenant au mutualiste MGEN, la mobilisation a été suivie par une centaine de personnes mardi dernier. « De voir les collègues des autres services (administration, technique, entretien, cuisine, cancérologie, soins de suite…), ça fait chaud au coeur. Il y a même des résidents et des proches qui sont venus nous soutenir », lançaient ces salariés aux blouses roses barrées d’un « en grève » sur le torse. Le mouvement est général. Comme le rasle-bol. Pour la première fois en France, dans ce secteur plutôt discret, directeurs et personnels ont lancé « un vrai SOS » au gouvernement pour obtenir plus de moyens dans leurs établissements de santé. Ce n’est pas qu’ils ont baissé. Plus insidieux, c’est la dépendance des personnes accueillies qui a fortement augmenté.
« On a le chronomètre en main »
A la Chimotaie, où 83 personnes âgées résident, les aidessoignantes ont vu l’évolution. « Par exemple, du fait de la création d’un secteur pour 14 personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de forts troubles cognitifs, une aide-soignante est désormais dédiée à ce service. Du coup, nous sommes 5 le matin et 4 l’après-midi avec les AMP et une infirmière à nous occuper des 69 autres personnes, sept jours sur sept » , lance Aurélie Massalla, porte-parole. « Résultat, c’est la course, enchaîne une de ses collègues. Nous avons le chronomètre en main pour faire les soins, les levers, la toilette et les repas. On n’a pas le temps de leur apprendre à être un peu plus autonomes. Une majorité de résidents sont totalement dépendants : il faut couper leur viande et les faire manger. Pour l’hygiène, on va au plus rapide et visible. Pour un homme, on va privilégier la barbe plutôt que la toilette du corps. Les ongles pour une femme. On arrive à maintenir une douche par semaine. C’est un peu mieux que ce qui se fait ailleurs » . La situation ne semble pas tendre vers une amélioration. La fin des contrats aidés annoncée cet été, par le gouvernement, interroge. « Ils sont une dizaine d’agents de soin à nous aider dans différentes tâches annexes (ménages, toilettes, repas…). Mais leur contrat va s’arrêter d’ici le printemps » , note Aurélie Massalla.
L’établissement colmate en remplaçant par des CDD. Un personnel « frustré » de ne pas pouvoir « accorder plus de temps » aux résidents. « Il n’y a plus de promenades ni de conversation. C’est l’usine. Ça crie. Ça nous appelle. On ne peut pas répondre. Pour ceux qui n’ont aucune famille, c’est une vie de prisonnier. Il n’y a pas de loisirs » , lance une aide-soignante. Un métier qui a de plus en plus de mal à recruter. Pour l’instant, la ministre de la santé, Agnès Buzyn, a dit « comprendre le malaise » , mais a refusé d’aller au- delà d’une rallonge de 50 millions d’euros. « Insuffisant » pour les syndicats. Qui demandent un vrai plan d’urgence.