« À Gaza comme en Ukraine, la solution viendra de l’extérieur »
L’UE doit agir en faveur de la paix, affirme Rony Brauman, qui analyse les possibles processus à mettre en oeuvre pour stopper la folie guerrière. En sortant de ses « cynismes » et en reconnaissant l’État de Palestine, l’Europe démontrera sa cohérence en termes de liberté et de droits des peuples.
Peut-on sortir de l’impasse guerrière en Ukraine et au Proche-Orient ?
La situation en Ukraine est épouvantable et déplorable depuis l’invasion russe. Mais si elle apparaît complexe et dangereuse, des négociations semblent envisageables. Le conflit russo-ukrainien a une issue sur le court terme, car cela apparaît planifiable : souveraineté, statut du Donbass et de la Crimée, neutralité militaire de l’Ukraine, des garanties de sécurité.
Des perspectives existent en reprenant déjà les éléments en négociation lors des accords de Minsk, après la première guerre en 2014-2015. Des concessions et des reculs territoriaux apparaissent nécessaires pour aboutir à une paix durable. Il faut condamner l’emballement nationaliste et identitaire russe, emmené par Vladimir Poutine qui a envahi un pays souverain. Mais il faut également dénoncer l’extension toujours plus agressive de l’Otan aux portes de la Russie. Sur le conflit à Gaza, les issues sont différentes. La guerre menée par l’armée israélienne sur l’enclave palestinienne peut être stoppée immédiatement. Il suffit de suspendre les livraisons d’armes. Cette décision de la Maison-Blanche pourrait en l’espace d’une semaine contraindre Israël d’arrêter les bombardements, puisque l’armée disposerait entre 3 et 10 jours de stocks de munitions. Elle apparaît simple, car il suffit d’un seul acteur pour stopper les massacres, le carnage et cette entreprise génocidaire à l’oeuvre à Gaza. Pour autant, cela ne met pas fin aux sources du conflit, qui demeure plus grave, plus aigu et plus brûlant que jamais. Après les dégâts humains causés, un nid de haine va en sortir. Elle risque d’engendrer des jeunes gens avides et obsédés de se venger des juifs. L’arrêt du conflit actuel à Gaza ne signifie pas la paix pour les Palestiniens. On revient à une situation antérieure d’occupation militaire, de colonisation, de violences sourdes et d’apartheid.
Comment l’Europe peut agir ?
Dans les deux conflits, c’est de l’extérieur que viendra une solution de paix. La première des règles est de respecter le droit international et humanitaire en tant que membre de l’ONU. Il faut forcer son application en sanctionnant les autorités israéliennes comme la
Russie. L’Europe devrait prendre enfin des mesures à l’encontre d’Israël, qui a commis un crime de masse. Elle doit suspendre l’accord d’association et obliger Israël à payer les dégâts causés sur le territoire palestinien. Cela stopperait cette hypocrisie sur le droit international entre les deux conflits. L’Europe peut agir pour sortir de ce cynisme et démontrer sa cohérence en termes de liberté et de droits des peuples. La reconnaissance de l’État de Palestine est indispensable, car il donne un statut aux Palestiniens et un statut illégal aux colonies. Près de 140 pays dans le monde reconnaissent déjà l’État de Palestine.
Il faut que les Occidentaux arrêtent avec un malentendu fondamental : les autorités israéliennes ne cherchent pas la paix. L’occupation, la colonisation, les exactions, la radicalisation identitaire, toute cette évolution fascisante incarnée par le gouvernement actuellement au pouvoir n’a pas remis en cause les soutiens dont il bénéficie. Au contraire, ils reçoivent des crédits militaires faramineux des États-Unis et ont un accès libre au marché européen.
Cet appui permet au pouvoir israélien, en 2018, l’adoption de lois fondamentales qui mentionnent clairement le développement de la colonisation comme une valeur nationale.
« L’OCCIDENT DOIT EN FINIR AVEC UN MALENTENDU FONDAMENTAL : LE RÉGIME ISRAÉLIEN NE CHERCHE PAS LA PAIX. »