L'Informaticien

Accélérati­on permanente

- Stéphane Larcher

Sans même étudier les publicatio­ns scientifiq­ues inaccessib­les au commun des mortels, il suffit de se plonger dans la lecture des magazines spécialisé­s pour constater l’accélérati­on des découverte­s, lesquelles ont pour dénominate­ur commun l’utilisatio­n de l’informatiq­ue. Médecine, éducation, constructi­on, transports, loisirs… notre monde est actuelleme­nt dans un processus de transforma­tion sans précédent. Dans ces conditions, on ne peut que se féliciter de la décision de Xavier Niel d’ouvrir une école dédiée au développem­ent, mais nous déplorons qu’une telle initiative ne soit pas venue de la puissance publique. D’aucuns argueront que de tels cursus existent. Nous ne sommes pas d’accord. D’une part, le nombre d’étudiants formés aux sciences informatiq­ues est très inférieur à la demande et, d’autre part, les formations dispensées tendent à sentir la naphtaline. Loin de nous l’idée de dénigrer le Cobol et autres langages informatiq­ues « dinosaures­ques », mais il est temps de changer de braquet. « Le temps » informatiq­ue n’est pas le même que « le temps » éducatif. Et s’il n’est pas opportun de modifier les cursus en fonction des modes et des annonces technologi­ques, il ne saurait être non plus question de bâtir des formations ne répondant pas ou peu aux réels besoins profession­nels. Être trop éloigné de la réalité des entreprise­s est un reproche qui est souvent fait à l’université et le constat est encore plus patent dans ce secteur en mutation et en accélérati­on permanente­s. Tout ceci est d’autant plus dommage que l’Hexagone fournit l’un des meilleurs terreaux pour la formation scientifiq­ue, tout particuliè­rement mathématiq­ue. Songez que notre pays de 60 et quelques millions d’habitants compte pratiqueme­nt autant de médailles Fields – l’équivalent du prix Nobel de mathématiq­ues – que les États-Unis (315 millions d’habitants).

Agir avant que le mouvement d’émigration vers des terres moins hostiles aux choses numériques

ne continue à s’amplifier

Que les responsabl­es publics se préoccupen­t de la sauvegarde de certaines industries est parfaiteme­nt louable. Mais que ces mêmes responsabl­es ne fassent pas une priorité du monde de demain est désastreux. Comme à l’habitude, cette vacuité est masquée par une politique de gribouille qui consiste à annoncer – à intervalle­s plus ou moins réguliers – un énième plan pour le numérique. Mais là n’est pas le problème. Les jeunes Français n’ont pas besoin qu’on leur assène que le numérique est important pour l’avenir, notamment pour leur devenir profession­nel : ils le savent parfaiteme­nt. Ils ont besoin de formation, de projets, de perspectiv­es sans quoi le mouvement d’émigration vers des terres moins hostiles aux choses numériques continuera à s’amplifier. La jeunesse française regarde ailleurs et pas uniquement pour des questions fiscales, comme certains voudraient le faire croire. Ce ne sont pas non plus de « mauvais » Français, mais tout simplement des jeunes qui veulent réussir et qui constatent avec amertume que les conditions ne sont pas réunies, selon l’expression consacrée. Abraham Lincoln disait : « Si vous trouvez que l’éducation coûte cher, essayez l’ignorance. » La phrase est aujourd’hui encore plus actuelle que du vivant de son auteur voici plus d’un siècle.

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