Accélération permanente
Sans même étudier les publications scientifiques inaccessibles au commun des mortels, il suffit de se plonger dans la lecture des magazines spécialisés pour constater l’accélération des découvertes, lesquelles ont pour dénominateur commun l’utilisation de l’informatique. Médecine, éducation, construction, transports, loisirs… notre monde est actuellement dans un processus de transformation sans précédent. Dans ces conditions, on ne peut que se féliciter de la décision de Xavier Niel d’ouvrir une école dédiée au développement, mais nous déplorons qu’une telle initiative ne soit pas venue de la puissance publique. D’aucuns argueront que de tels cursus existent. Nous ne sommes pas d’accord. D’une part, le nombre d’étudiants formés aux sciences informatiques est très inférieur à la demande et, d’autre part, les formations dispensées tendent à sentir la naphtaline. Loin de nous l’idée de dénigrer le Cobol et autres langages informatiques « dinosauresques », mais il est temps de changer de braquet. « Le temps » informatique n’est pas le même que « le temps » éducatif. Et s’il n’est pas opportun de modifier les cursus en fonction des modes et des annonces technologiques, il ne saurait être non plus question de bâtir des formations ne répondant pas ou peu aux réels besoins professionnels. Être trop éloigné de la réalité des entreprises est un reproche qui est souvent fait à l’université et le constat est encore plus patent dans ce secteur en mutation et en accélération permanentes. Tout ceci est d’autant plus dommage que l’Hexagone fournit l’un des meilleurs terreaux pour la formation scientifique, tout particulièrement mathématique. Songez que notre pays de 60 et quelques millions d’habitants compte pratiquement autant de médailles Fields – l’équivalent du prix Nobel de mathématiques – que les États-Unis (315 millions d’habitants).
Agir avant que le mouvement d’émigration vers des terres moins hostiles aux choses numériques
ne continue à s’amplifier
Que les responsables publics se préoccupent de la sauvegarde de certaines industries est parfaitement louable. Mais que ces mêmes responsables ne fassent pas une priorité du monde de demain est désastreux. Comme à l’habitude, cette vacuité est masquée par une politique de gribouille qui consiste à annoncer – à intervalles plus ou moins réguliers – un énième plan pour le numérique. Mais là n’est pas le problème. Les jeunes Français n’ont pas besoin qu’on leur assène que le numérique est important pour l’avenir, notamment pour leur devenir professionnel : ils le savent parfaitement. Ils ont besoin de formation, de projets, de perspectives sans quoi le mouvement d’émigration vers des terres moins hostiles aux choses numériques continuera à s’amplifier. La jeunesse française regarde ailleurs et pas uniquement pour des questions fiscales, comme certains voudraient le faire croire. Ce ne sont pas non plus de « mauvais » Français, mais tout simplement des jeunes qui veulent réussir et qui constatent avec amertume que les conditions ne sont pas réunies, selon l’expression consacrée. Abraham Lincoln disait : « Si vous trouvez que l’éducation coûte cher, essayez l’ignorance. » La phrase est aujourd’hui encore plus actuelle que du vivant de son auteur voici plus d’un siècle.