L’Europe en pointe
Les réseaux sociaux ne contribuent pas à l’ouverture d’esprit mais au contraire à l’enfermement dans ses propres idées. Telles sont les conclusions d’une étude menée par plusieurs chercheurs européens et qui ont présenté leurs travaux à Lyon lors de la dernière semaine d’avril. On s’en doutait un peu, mais voilà une nouvelle confirmation que ces réseaux peuvent se révéler très nocifs pour des esprits peu enclins à accepter la contradiction ou incapables de remettre en question leurs propres opinions. « À l’origine de ces interrogations, le constat désormais très répandu qu’au lieu d’amener les internautes à échanger leurs points de vue et bâtir des théories nuancées, utopie qui a porté la démocratisation d’Internet dans les années 90, l’émergence des réseaux sociaux et des algorithmes de recommandation a, au contraire, amené une radicalisation des points de vue, une exacerbation des tensions en ligne et une impossibilité chronique à se faire
entendre et respecter » , écrit notre confrère William Audureau dans le Monde du 24 avril dernier. Cette nouvelle pierre dans les jardins Facebook, Twitter et autres arrive à un moment où la confiance dans ces réseaux est sérieusement ébranlée par les dernières révélations autour de Cambridge Analytica ( lire notre dossier en pages 12 et suivantes). Les patrons de ces entreprises ont- ils conscience des dangers qu’ils font courir ? Il est permis d’en douter, en particulier si l’on considère les atermoiements de Facebook quant à la mise en conformité par rapport au RGPD ( lire en page 32). Cependant, on peut relever quelques signes positifs comme la décision de YouTube de supprimer plusieurs millions de vidéos ouvertement racistes, vidéos pour lesquelles de nombreux annonceurs n’hésitaient pas à afficher des insertions publicitaires. Contrairement à d’autres, Google semble décidé à s’attaquer au mal, suivant ainsi son ancienne devise : Don’t
be evil que l’on traduira par Ne faites pas le mal. De même, sa récente décision d’investir massivement dans de nouveaux secteurs au détriment des profits à court terme marque la volonté du Géant de s’inscrire durablement dans les technologies, consciente que son statut de plus grande agence de publicité mondiale ne durera pas éternellement. Comme l’ont répété plusieurs responsables économiques et politiques, au premier rang desquels le chef de l’État, le RGPD va donner aux citoyens européens une protection de leur vie privée bien supérieure à ce qui existe dans le reste du monde. Pour une fois, l’Europe est en avance et des voix s’élèvent en Amérique et ailleurs pour que cette protection soit également appliquée aux États- Unis et en Asie. Le chemin sera long mais il n’est pas impossible. ❍