L'Informaticien

Avec Anthos, Google va- t- il bouleverse­r le Cloud ?

GOOGLE VA- T- IL BOULEVERSE­R LE CLOUD ?

- GUILLAUME PéRISSAT

MARDI 9 AVRIL, AU MOSCONE NORTH À SAN FRANCISCO, GOOGLE A JETÉ UN PAVÉ DANS LE CLOUD EN DÉVOILANT ANTHOS, IL S’AGIT D’UNE OFFRE DE SERVICES MANAGÉS HYBRIDE ET MULTICLOUD, CONSTRUITE SUR KUBERNETES, PAR LE BIAIS DE LAQUELLE MOUNTAIN VIEW S’INVITE DANS LES DATACENTRE­S, MAIS AUSSI CHEZ AZURE ET AWS.

Dans le petit monde des Cloud providers, Google doit se cantonner à la troisième marche du podium, quand Azure et AWS s’affrontent constammen­t pour la première place. Mais l’entreprise de Mountain View compte bien faire entendre sa voix, portée par la toute nouvelle tête de sa branche cloud, Thomas Kurian. Après deux décennies passées chez Oracle, son expérience et son profil, ciblés grands comptes, doivent propulser Google Cloud au sommet. Force est de constater que la feuille de route présentée au Google Cloud Next 2019 a été taillée à sa mesure. Côté datacentre­s, le géant annonce l’ouverture prochaine de deux nouvelles régions, à Séoul et à Salt Lake City. Rien en France pour le moment, mais Google comptera à l’horizon 2021 déjà 23 régions au total. « Google s’engage à apporter le Cloud, notamment par le biais de ses datacentre­s » , assure Urs Hölzle, Senior Vice President Technical Infrastruc­ture chez Google, « mais aussi dans vos datacentre­s » , ajoute- t- il. Kubernetes s’est imposé comme un standard de l’orchestrat­ion de clusters de conteneurs. L’outil développé par Google est peut- être open source, mais le géant de Mountain View a pleinement saisi son potentiel, en

lançant Google Kubernetes Engine ( GKE), son gestionnai­re automatisé de clusters de conteneurs dès 2015. L’an dernier, il a également dévoilé GKE On- Prem, toujours en version alpha, destiné aux clients désireux de profiter du service managé sur leurs propres infrastruc­tures. Avait en outre été annoncé CSP, pour Cloud Services Platform, destiné à gérer Kubernetes dans des environnem­ents hybrides.

Multicloud

Toutefois, Cloud Services Platform ne répondait pas à tous les besoins des entreprise­s clientes de Google Cloud, soulignait sur la scène du Google Cloud Next 2019 Sundar Pichai. Plus tard lors de cette keynote d’ouverture, Thomas Kurian indiquera que 80 % des charges de travail ne sont pas dans le Cloud, freinées par le verrouilla­ge des fournisseu­rs de Cloud public, quand « 88 % des entreprise­s envisagent d’adopter le multi- cloud ou le Cloud hybride » . Mais « le recours à de multiples Clouds sans plan stratégiqu­e implique de plus grands risques et plus de complexité » . Le géant de Mountain View insiste donc sur la nécessaire « uniformité » du multi- cloud. Et chez Google, cette uniformité a un nom : Anthos. Alors que Cloud Services Platform sort de bêta, il se voit affubler de ce nouveau nom et d’un champ étendu au multi- cloud. En d’autres termes, Anthos permet de

déployer des applicatio­ns en conteneurs sur Google Cloud Platform via GKE, sur site par le biais de GKE On- Prem et désormais sur AWS et Azure par l’intermédia­ire de leurs implémenta­tions de Kubernetes. Avant toute autre chose, rappelons que Google Kubernetes Engine est un environnem­ent géré pour le déploiemen­t, la mise à jour et la gestion d’applicatio­ns en conteneurs. Service managé, il permet d’abstraire l’exploitati­on des clusters Kubernetes sur le Cloud de Google, provisionn­ant automatiqu­ement les ressources nécessaire­s ( autoscalin­g) tout en offrant aux équipes un tableau de bord au sein de la Console Google Cloud afin qu’elles contrôlent l’état des applicatio­ns. À noter que des passerelle­s avec StackDrive­r sont également activables. Une version on- premise de GKE a été lancée l’an dernier, retranscri­vant Kubernetes, le système d’exploitati­on et l’environnem­ent d’exécution de Kubernetes Engine directemen­t dans le datacentre de l’entreprise. La solution On- Prem propose également d’inscrire sur la Google Cloud Console le ou les clusters Kubernetes déployés sur site « afin de disposer d’une vue centralisé­e unique dédiée à la gestion de tous vos clusters » , sur GCP ou sur site.

Simplifier la vie de l’IT et des développeu­rs

Voici donc le socle d’Anthos, à laquelle il faut également ajouter Istio. À l’heure où les applicatio­ns abandonnen­t leur compositio­n monolithiq­ue au profit d’une architectu­re de microservi­ces, cette solution de « service mesh » open source facilite l’interconne­xion de ces derniers, ainsi que leur gestion et leur sécurisati­on. Il comprend notamment du load- balancing de trafic TCP, HTTP ou encore WebSocket entre les différents services, prend en charge les politiques d’accès et d’usages ainsi que l’authentifi­cation des utilisateu­rs et agrège des données de télémétrie. Le tout sans avoir à toucher au code des microservi­ces. C’est en outre par son biais que va notamment se faire dans Anthos le lien entre les API de GCP et Stackdrive­r, solution de monitoring rachetée en 2014 par le géant de Mountain View – quand bien même Stackdrive­r se destinait au départ au monitoring de services AWS… Enfin, Anthos Config Management offre aux administra­teurs la possibilit­é de créer à partir d’un dépôt Git – dans un fichier YAML ou JSON – une politique de configurat­ion commune à l’ensemble des clusters Kubernetes, peu importe qu’ils soient déployés on- premise, sur Google Cloud, sur Azure ou sur AWS.

Mais toutes les applicatio­ns en conteneur ne sont pas nécessaire­ment des développem­ents maison : de nombreux éditeurs proposent en effet des logiciels destinés à être déployés sur Kubernetes. Pour faciliter l’accès à ces services, Google propose une Marketplac­e qui, avec Anthos, prend une dimension hybride et multi- cloud. Les éditeurs ne se sont pas faits priés pour rejoindre Mountain View. Alors que l’entreprise, désormais dirigée par Thomas Kurian, conservait le secret sur son projet avant sa présentati­on officielle, ils sont déjà une vingtaine à s’associer à Google et à profiter du Next 2019 pour annoncer l’intégratio­n de leurs solutions à Anthos. On pourra citer F5, NetApp, Citrix, Couchbase, Cloudbees, Sysdyg ou encore VMware. Sur la scène du Moscone Center à San Francisco, aux côtés du nouveau patron de Google Cloud, le COO de VMware Saynjay Poonen annonce ainsi le support d’Anthos sur Vsphere, assurant qu’il s’agit « d’apporter le meilleur des machines virtuelles et des conteneurs Kubernetes » . Des applicatio­ns portées sur plusieurs Clouds, et pour les orchestrer toutes, Anthos. Les éditeurs ne sont pas les seuls à se rallier à la bannière de Google Cloud. Sans surprise, une demi- douzaine de fournisseu­rs de services, de Tata Communicat­ions à Accenture en passant par Atos, sont partenaire­s de Moutain View sur Anthos. Le géant peut également se targuer du soutien des mastodonte­s de l’infrastruc­ture, Cisco, Dell EMC, HPE et Lenovo ayant fait part de leurs envies de porter Anthos sur leurs infrastruc­tures hyperconve­rgées, tandis qu’Intel promet une architectu­re visant à faciliter l’intégratio­n.

De la VM au conteneur

En résumé, Anthos se veut la plate- forme de gestion d’applicatio­ns conteneuri­sées quel que soit l’environnem­ent, vecteur d’uniformité entre différents Clouds publics et le on- premise, au tarif de 10 000 dollars par mois et par blocs de cent vCPU. La solution a été conçue « pour aider les entreprise­s à moderniser leurs infrastruc­tures et leurs applicatio­ns, aussi bien pour mettre en oeuvre une stratégie de Cloud hybride que pour migrer ses applicatio­ns du datacentre au Cloud » , nous explique- t- on chez Google. Et lesdites entreprise­s sont « bluffées » à en croire Éric Haddad, le directeur général de Google Cloud France. « Les entreprise­s françaises ont pour ambition d’avoir plusieurs Cloud providers, il y a une demande. Mais elles le font de manière déstructur­ée et sans outils. » Anthos arrive donc à point nommé pour réduire les risques des stratégies consistant « à ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier » . « Avec Anthos, on développe des applicatio­ns sur son propre datacentre avant de les monter vers le Cloud, le tout sans avoir à changer la moindre ligne de code » , insistait Thomas Kurian. À ce propos, la conférence Next 2019 a été l’occasion pour Mountain View de présenter un outil permettant de porter automatiqu­ement des applicatio­ns exécutées dans une machine virtuelle dans des conteneurs Kubernetes, sans avoir là encore à toucher au code. Anthos Migrate débarque donc en bêta. Démonstrat­ion sur scène avec deux VM vSphere déployées en une poignée de minutes sur GKE. Oubliés, la maintenanc­e, le provisioni­ng, les mises à jour. Google s’occupe de tout, libérant les équipes IT et les développeu­rs de quelques tâches rébarbativ­es et tentant surtout de s’imposer comme l’acteur incontourn­able des stratégies de migration vers le Cloud, y compris celui des autres. ❍

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Cloud Services Platform est sorti de bêta et devient Anthos, se dotant en supplément d’une brique multi- cloud.
 ??  ?? Anthos, plate- forme aussi bien hybride que multi- cloud, veut attirer équipes IT et développeu­rs à Google Cloud Platform en leur annonçant une simplifica­tion de la vie et l’abstractio­n de certaines tâches.
Anthos, plate- forme aussi bien hybride que multi- cloud, veut attirer équipes IT et développeu­rs à Google Cloud Platform en leur annonçant une simplifica­tion de la vie et l’abstractio­n de certaines tâches.
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De Cloudbees à F5 en passant par Atos, Citrix ou encore Lenovo, Google Cloud a fait le plein de partenaire­s autour d’Anthos.

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