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La galère de la tech en France
Avec la pandémie actuelle, on peut avoir l’impression que les entreprises de la tech s’en sortent mieux que les autres. Les sites d’e- commerce, malgré la défaite d’amazon devant le tribunal de Nanterre, poursuivent les livraisons, tandis que les solutions utiles pour travailler à distance, VPN, logiciels de sécurité, platesformes collaboratives, connaissent un boom d’utilisation. Pourtant, le tableau que dépeignent en France les associations professionnelles et les syndicats est moins reluisant. Dès le début de la crise sanitaire dans l’hexagone, Tech In France tirait la sonnette d’alarme. Après avoir interrogé ses adhérents, l’association signalait que les éditeurs français de logiciels ne traverseraient pas la crise sans mal. Première cause des difficultés rencontrées par ses membres, les pressions venant de leurs clients. Ces derniers, prétextant le cas de force majeure, chercheraient à interrompre ou à renégocier ces engagements contractuels. Une tactique que PierreMarie Lehucher, président de Tech in France, juge « assez indigne » , alors que les éditeurs de logiciels, non contents de devoir s’adapter aux mesures sanitaires en vigueur, doivent également composer avec le gel des nouveaux projets en termes d’achats de logiciels ou de souscription à de nouveaux contrats. Les adhérents de l’association prévoient « une diminution drastique du volume de nouvelles affaires » , de l’ordre de 60 %.
Même son de cloche du côté du Syntec Numérique. Selon le syndicat des entreprises du numérique, 74,1 % de ses adhérents prévoient une baisse de leur chiffre d’affaires prévisionnel sur le deuxième trimestre 2020, en moyenne de - 22,9 %. Le Syntec fustige lui aussi un allongement perçu des délais de paiement qui risque « de renforcer les difficultés de trésorerie des plus petits acteurs » , et souligne la gravité des conséquences puisque 46 % des dirigeants expriment leur « inquiétude quant à la pérennité de leur entreprise si la reprise de l’économie ne se fait pas à un rythme normal dans trois mois » . D’autant que les entreprises interrogées n’envisagent, pour la plupart, pas un redémarrage au niveau pré- crise avant le dernier trimestre 2020, et encore… avec un étalement jusqu’au deuxième trimestre 2021.
Maintenir le réseau, oui, mais quid de le déployer ?
Quant aux réseaux, les opérateurs télécom ne rencontrent pas de grandes difficultés et, malgré la hausse du trafic, les infrastructures tiennent bon. Les réseaux et services de télécommunication étant « essentiels à la continuité de la vie de la nation » , le gouvernement a pris une série de mesures spécifiques permettant aux telcos de poursuivre leurs activités et de pouvoir intervenir en cas de panne. Pourtant, les temps sont durs, à en croire Infranum. Et pour cause ! Si le gouvernement garantit les activités de maintenance des infrastructures, il n’en est rien pour leur production et leur déploiement. « Sans la mobilisation totale de tous les acteurs de l’ensemble de la chaîne logistique sous- jacente – travaux publics, énergie, transport, etc., avec les collectivités, les donneurs d’ordres et l’état – la production pourrait tomber à l’arrêt total au printemps, avec une inertie de 12 mois pour remettre le secteur à flot et des conséquences sociales et économiques dramatiques » , s’alarme la fédération. Infranum prévient : en cas d’arrêt complet de l’activité au deuxième trimestre, soit la mise entre parenthèse du Plan Très Haut Débit, 20 000 salariés se retrouveraient au chômage technique, quand déjà les membres de la fédération ont mis en chômage partiel la moitié de leurs effectifs. « La machine s’enraye et ce n’est qu’un début… » , avertit Infranum, insistant sur les milliards d’euros de perte de chiffre d’affaires, sur les possibles licenciements et sur les difficultés après crise à relancer la production, prévoyant qu’il faudra au moins 12 mois pour redémarrer.