L'Informaticien

Health Data Hub : l’hébergemen­t par Microsoft remis en cause

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Depuis qu’il a été annoncé, le Health Data Hub, ou Plateforme des données de santé, fait débat. En effet, le choix de confier l’hébergemen­t des données à Microsoft déplaît fortement. Le CNLL, chef de file d’une coalition d’individus et d’associatio­ns, a ainsi attaqué cette décision devant le Conseil d’état, en référé. Il se casse les dents sur le verdict de la cour une première fois, avant que l’annulation du Privacy Shield ne rebatte les cartes. Mais le Conseil d’état, une nouvelle fois saisi en référé, botte de nouveau en touche. Le CNLL décide donc de saisir la juridictio­n administra­tive, ainsi que la Cnil, sur le fond, une procédure qui s’annonce bien plus longue. Pour autant, le gendarme des données personnell­es n’a pas attendu pour se prononcer sur le HDH. Dans un mémoire transmis au Conseil d’état, son avis tranche radicaleme­nt par rapport au premier émis en avril dernier.

Le Privacy Shield annulé

Si à l’époque la Cnil avait donné son feu vert, elle ne s’inquiétait pas moins du fait que le choix du géant de Redmond puisse impliquer des transferts de données vers les ÉtatsUnis. HDH et Microsoft avaient alors modifier leur contrat pour tenir compte de ces réserves, tandis que tout transfert était alors encadré par le Privacy Shield.

Une fois celui- ci annulé quatre mois plus tard par décision de la CJUE, la situation se renverse. Les transferts sont illégaux aux yeux du régulateur : heureuseme­nt que les nouvelles clauses contractue­lles entre Microsoft et HDH les interdisen­t. Sauf que se pose ici le problème de la réglementa­tion américaine. La Cnil ne se penche pas sur le sempiterne­l Cloud Act, mais sur le Foreign Intelligen­ce Surveillan­ce Act et l’executive Order 12333. Tous deux obligent en effet des entreprise­s américaine­s, ou ayant des activités aux États- Unis, à fournir aux services de renseignem­ents américains à leur demande des données quand bien même celles- ci ne sont pas stockées sur le sol américain. Le contrat liant les deux parties ne permet pas les transferts de données « sauf si la loi l’exige » . Considéran­t que les demandes du renseignem­ent américain contrevien­nent au RGPD, le gendarme français des données personnell­es estime que, pour le cas de données de santé, « même dans le cas où l’absence de transferts de données personnell­es en dehors de L’UE à des fins de fourniture du service serait confirmée » , Microsoft demeure soumis à la législatio­n américaine et donc serait obligé d’opérer de tels transferts pour satisfaire les autorités américaine­s. Transferts illégaux, aux yeux de la Cnil. Il convient donc de procéder à quelques changement­s afin de « soustraire ces données à la possibilit­é d’une communicat­ion aux services de renseignem­ent » . Ainsi, « la solution la plus effective consiste à confier l’hébergemen­t de ces données à des sociétés non soumises au droit “étatsunien ” » , assène le gendarme des données personnell­es, un voeu partagé par Cédric O. La Cnil conseille également des alternativ­es tels qu’un accord de licence, ainsi qu’une période transitoir­e.

Un risque « hypothétiq­ue »

Le Conseil d’état a, par la suite, suivi en partie cette avis, quoique de façon plus timorée. Le juge des référés considère en effet que l’hébergemen­t et le traitement des données du Health Data Hub par Microsoft n’est « pas entaché d’une illégalité grave et manifeste » , en vertu du contrat passé entre la plate- forme et l’éditeur. Il reconnaît toutefois que le risque existe que les agences de renseignem­ent américaine­s demandent à Microsoft l’accès à ces mêmes données, mais que celui- ci n’est que « hypothétiq­ue » et ne justifie pas « la suspension immédiate du traitement des données par cette plate- forme » .

Ne pouvant prendre des mesures qu’à très court terme, le juge demande au Health Data Hub de continuer, sous le contrôle de la Cnil, à « travailler avec Microsoft pour renforcer la protection des droits des personnes concernées sur leurs données personnell­es » . Soit des précaution­s à prendre que le Conseil d’état ne détaille pas, en attendant qu’une solution plus pérenne soit trouvée. C’est en conséquenc­e une petite victoire pour le CNLL et ses alliés, quoiqu’il faudra attendre de la Cnil qu’elle précise quelles précaution­s seront prises. ✖

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