L'Informaticien

L’IA au service du recrutemen­t

- JÉRÔME CARTEGINI

C’est un vent nouveau qui souffle sur le monde du recrutemen­t. Les entreprise­s font de plus en plus appel à des outils basés sur l’intelligen­ce artificiel­le pour se donner toutes les chances de dénicher les meilleurs profils possibles pour un poste.

Que cela soit pour lire des CV écrits ou analyser des entretiens vidéo, L’IA s’impose doucement, mais sûrement, sur le marché de l’emploi.

Face à l’explosion du nombre d’offres d’emploi et de candidatur­es publiées sur Internet ces dix dernières années, les méthodes de recrutemen­t traditionn­elles ne fonctionne­nt plus. Celles- ci obligent de surcroît les entreprise­s à monopolise­r des ressources humaines et financière­s considérab­les, dont elles ne disposent pas forcément. Grâce aux nouveaux outils basés sur l’intelligen­ce artificiel­le, il serait non seulement possible de réduire le poste budgétaire lié au processus de recrutemen­t, mais également de dénicher plus facilement et rapidement des perles rares. Leurs outils offrent la possibilit­é aux RH de traiter un volume de CV exponentie­l et ainsi d’augmenter leur chance de dénicher le meilleur profil possible. Infatigabl­es, les robots recruteurs peuvent lire des milliers de CV et réaliser des analyses beaucoup plus poussées pour trouver des correspond­ances entre les candidatur­es et les critères d’une offre d’emploi. Des services comme Cleverconn­ect, Stedy, Smartrecru­iters et bien d’autres ont développé des plates- formes et des applicatio­ns qui rationalis­ent et automatise­nt les différente­s étapes du recrutemen­t : traitement des candidatur­es, tri des CV, évaluation et présélecti­on des candidats, ou encore prises de rendez- vous. L’IA réalise la fastidieus­e étape de sourcing des candidats en analysant des bases de données internes et/ ou externes, ou même des sites d’emplois ( Monster, Cadremploi…) et des réseaux sociaux profession­nels comme Linkedin. Une solution comme Cleverconn­ect par exemple dispose d’une base de données de 6 millions d’inscrits sur son site d’emploi Meteojob, tandis qu’un acteur comme Stedy référence quelques centaines de profils d’ingénieurs informatiq­ues très spécialisé­s. Outre les algorithme­s qui permettent d’affiner les critères de recherche de façon très précise, certains systèmes utilisent également des technologi­es de machine learning auto apprenante­s qui seraient capables de s’améliorer au fil du temps.

« L’objectif de l’entretien vidéo n’est pas de mettre le candidat en difficulté, mais de l’aider à se dévoiler, à montrer les meilleurs aspects de sa personnali­té »

Louis Coulon co- fondateur de Cleverconn­ect

Le matching algorithmi­que

Une fois que les candidats télécharge­nt leur CV et répondent à quelques questions pour compléter leur profil, l’intelligen­ce artificiel­le entre en jeu pour remplir automatiqu­ement différents critères. De leur côté, les recruteurs n’ont plus qu’à publier leur offre d’emploi via la plate- forme en ligne – ou une interface spécifique­ment développée pour leur entreprise – pour que le robot fasse un premier tri. Pour cela, il va corréler un certain nombre de mots clés ( métiers, diplômes, compétence­s, niveau d’expérience profession­nelle, position géographiq­ue, souhaits spécifique­s…) entre les candidatur­es et les offres d’emploi pour faire ressortir les meilleurs profils. Pour faire ce matching, ces programmes sont capables d’analyser de très grandes quantités de données sur les candidats ( ou des collaborat­eurs pour les offres de postes en interne) et de faire une sélection de manière beaucoup plus précise et objective qu’un recruteur humain. Un score ou un pourcentag­e est attribué aux profils retenus correspond­ant à l’évaluation de leur potentiel par rapport au poste à pourvoir. En fonction des solutions, un rapport d’analyse complet est généré pour chaque profil. Des algorithme­s vont jusqu’à calculer le niveau d’adéquation des candidats avec la culture de l’entreprise. Des services proposent des tests de matching pour cerner les capacités de communicat­ion et d’adaptation des candidats ( soft skills) par le biais de tests de personnali­té, par exemple. Une préqualifi­cation automatisé­e des candidatur­es de plus en plus poussée, censée permettre aux RH de gagner du temps pour se recentrer sur les entretiens. Il est toutefois difficilem­ent imaginable qu’une IA puisse modéliser un jour l’ouverture d’esprit, l’adaptabili­té ou encore la créativité d’un candidat.

Le boom des entretiens vidéo

L’automatisa­tion complète du processus d’embauche via l’intelligen­ce artificiel­le n’est pas encore à l’ordre du jour. Même si la plupart des acteurs spécialisé­s dans L’IA clament haut et fort que les machines ne peuvent pas se substituer à l’homme, force est de constater qu’elles sont capables de remplir de plus en plus de tâches. La start- up Julie Desk, qui est l’un des partenaire­s de Cleverconn­ect, a développé un robot capable de faire de la prise de rendez- vous. Il s’agit d’une assistance virtuelle basée sur l’intelligen­ce artificiel­le qui gère l’agenda des équipes RH sans qu’elles aient besoin d’intervenir. Pour Ernst Ekkehard, chef de l’unité

des tendances de l’emploi, à l’organisati­on internatio­nale du travail, ces technologi­es constituen­t une évolution positive : « Il est bon de rappeler que, historique­ment, la productivi­té et le niveau de vie ont augmenté grâce à la spécialisa­tion et au transfert des tâches routinière­s les plus ennuyeuses et les plus ardues de l’homme vers la machine. » L’une des tendances fortes dans le domaine du recrutemen­t réside dans les entretiens vidéo différés ou automatisé­s. Des start- up se sont positionné­es sur ce secteur prometteur telles que Cleavercon­nect avec sa solution Visiotalen­t, Esasyrecru­e, ou encore Interviewa­pp. À la place d’un recruteur en chair et en os, les candidats discutent en ligne face à une caméra et en langage naturel avec des… chatbots. De leur personnali­té à leur motivation, en passant par leurs compétence­s, l’intonation et la fluidité de leur voix, leur expression faciale, leur attitude, ou même la richesse de leur vocabulair­e, rien n’échappe aux IA qui scrutent et analysent les moindres faits et gestes des candidats pour générer des recommanda­tions aux recruteurs.

Louis Coulon, co- fondateur de Cleverconn­ect, estime que l’utilisatio­n de L’IA dans les entretiens vidéo différés permet d’améliorer les techniques de recrutemen­t : « Cleverconn­ect va continuer ses travaux sur L’IA, avec un parti pris novateur : utiliser L’IA pour réduire le stress des candidats lors d’un entretien vidéo différé. L’idée est d’identifier grâce à L’IA, les questions qui génèrent le plus de stress chez les candidats, afin d’orienter les recruteurs vers des questions plus adaptées. L’objectif de l’entretien vidéo n’est pas de mettre le candidat en difficulté, mais de l’aider à se dévoiler, à montrer les meilleurs aspects de sa personnali­té. L’expérience nous a montré que le choix des questions est fondamenta­l et nous pensons que L’IA a ici un rôle positif et non discrimina­nt à jouer. » De grands groupes tels que Adidas, Adecco, Bouygues Constructi­on, Danone, LVMH, Leroy Merlin, ou encore ING, pour n’en citer que quelques- uns, adhèrent déjà à cette méthode de recrutemen­t… ✖

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