NVME s’impose
Le protocole Non Volatile Memory express ( NVME) devient la norme de fait pour autoriser le stockage performant dont les entreprises ressentent le besoin. Si la technologie est au point, son administration reste encore complexe pour une partie du marché.
Pour Gabriel Ferreira, responsable technique chez Pure Storage France, les constructeurs n’ont pas eu le choix « de passer sur des SSD en SAS, mais l’interface SAS s’appuie sur L’ISCSI, une tuyauterie conçue pour les disques mécaniques avec peu de canaux de communication » . Ils ne pouvaient utiliser le SSD au maximum de ses capacités. Ils se sont tournés vers un autre protocole pour « remplacer L’ISCSI pour profiter du parallélisme apporté par l’interface PCIE – Peripheral Component Interconnect Express » . Alexandre Chalkias, chez Canonical, renchérit : « Le NVME commence à s’imposer quand il faut résoudre des problèmes de performance avec des disques optimisés pour la rapidité de lecture. » Selon Franklin Lopez, chez Jiliti, ex- entité d’econocom reprise par des investisseurs et spécialisée dans la maintenance et le support des infrastructures serveurs et de stockage, « Le NVME commence à s’imposer chez certains clients pour des workloads critiques mais le SSD SAS reste très présent pour les utilisations standard. Le NVME est surtout utilisé pour accélérer les performances intermédiaires en créant du cache pour améliorer certaines baies de disques. On délègue à la couche logicielle pour améliorer l’ensemble. » Bruno Picard, directeur de l’engineering system chez Nutanix, ajoute : « NVME est d’actualité chez nous avec la réécriture de la couche d’accès au stockage dans AOS qui permet de limiter les appels à la CPU du système. Avec cela nous augmentons les performances en I/ O de 50 %. Dans la CVM, la machine virtuelle sous L’OS de Nutanix il n’y pas d’appel au kernel ce qui est intéressant même dans des environnements hybrides dans le support des technologies NVME car on peut déporter des accès ISCSI aux sous- systèmes disques en adressant directement les appels ISCSI vers le drive NVME en évitant de passer par la couche système. On divise ainsi le temps d’accès par deux. Cela fonctionne dans les deux sens. Cela a un gros intérêt en écriture mais aussi en lecture. »
Une technologie encore chère ?
Pour Gabriel Barazer d’oxeva, un offreur d’hébergement à haute disponibilité, se montre réservé sur le coût de NVME. « Le NVME en gros, selon moi signe la mort de beaucoup de technologies utilisées en datacenter, coûteuses et parfois mal maîtrisées : les disques mécaniques SAS 10 000 tours et 15 000 tours, les cartes raid et autres contrôleurs de stockage traditionnels SATA, SAS et FC ( fibre channel) et la nécessité de réseaux SAN FC. C’est très prisé dans le monde de l’entreprise, cela coûte cher et nécessite des réseaux dédiés à ce type de technologie. Le NVME, c’est un ordre de grandeur supérieur en termes de performances, une densité équivalente voire supérieure – les disques NVME de 16 ou 30 To existent et ont un rapport coût/ capacité linéaire – et les mêmes fonctionnalités “entreprise” : chiffrement natif, gestion de l’intégrité des données écrites, utilisation en réseau de stockage, segmentation des disques
« Les constructeurs se sont tournés vers un autre protocole pour remplacer le ISCSI pour profiter du parallélisme apporté par l’interface PCIE »
Gabriel Ferreira responsable technique chez Pure Storage
et “zoning”. Le tout avec une fiabilité supérieure aux disques mécaniques et aujourd’hui une durabilité – le point faible n° 1 des SSD – très maîtrisée. Le seul bémol, c’est que les outils pour les gérer sont aujourd’hui prêts pour la prod mais pas encore très développés ; les performances qu’ils peuvent fournir nécessitent d’équiper les serveurs de plus de puissance de calcul ( CPU) pour les exploiter pleinement. Sur le plan politique, le NVME coûte encore cher chez les grands fabricants de serveurs, car ils ne veulent pas cannibaliser leur marché “classique” SAS/ FC alors que pourtant les coûts sont équivalents voire inférieurs à ces technologies- là. Le seul cas d’usage valable non NVME en matière de stockage, c’est le back- up ou le stockage très massif d’objets au moindre coût, qui peut être réalisé par des systèmes utilisant des disques mécaniques très denses – et lents – avec un rapport coût/ capacité imbattable aujourd’hui : environ 20 €/ To alors que, en NVME, on est plutôt aux alentours de 200 €/ To ! » Il ajoute que l’on risque dans les mois à venir de proposer une surenchère en proposant du “NVME direct”, dans le sens où « au lieu que les VM qu’on propose stockent les données des disques virtualisés situés sur un système de stockage centralisé basé sur du NVME, le “NVME direct” permettra d’utiliser du stockage NVME directement dans les VM. L’inconvénient de cette méthode est que l’on perd les avantages de la virtualisation du stockage : résilience, réplication et redondance des données, mais l’avantage est que les performances sont très supérieures. »
Le NVME- over Fabrics, prochaine étape
Plusieurs éditeurs/ constructeurs suivent déjà la piste du NVME- of ( NVME over Fabrics) comme Pavilion Data ou Vast Data mais aussi Pure Storage, HPE, DellEMC ou encore Netapp. Le NVME- of apporte les performances de systèmes DAS sur un réseau Ethernet, Infiniband ou FC dédié au stockage. Le NVME est un protocole de communication et un contrôleur associé fournissant des échanges extrêmement rapides conçu pour la NAND flash et exploitant la bande passante du bus PCIE.
Le NVME over Fabric offre les mêmes avantages en termes de performance que le NVME interne mais hors de la baie en déployant le protocole sur un réseau LAN Ethernet, Fiber Channel ou Infiniband. On obtient ainsi une capacité de latence extrêmement faible et une bande passante très élevée sur le réseau. NVME- of est vu comme l’alternative au SAN classique. Les travaux sur la spécification NVME over Fabrics ont débuté en 2014 et se sont achevés en juin 2016 avec la publication de la version 1.0 du standard. Le but du NVME over Fabrics est de garantir que l’usage d’une « fabric » réseau n’ait pas plus de 10 microsecondes d’impact en termes de latence sur le traitement d’une opération d’entrées/ sorties, par rapport à l’usage de NVME dans un serveur. ✖
« Le NVME signe la mort de beaucoup de technologies utilisées en datacenter, coûteuses et parfois mal maitrisées »
Gabriel Barazer Oxeva