« Notre force repose sur les services autour des données que nous développons depuis vingt ans »
Retour avec Philippe Charpentier, directeur technique de Netapp, sur les annonces effectuées lors de la conférence INSIGHT à Las Vegas ainsi que sur la stratégie globale de l’entreprise autour de l’intelligence artificielle ( IA).
Netapp est un spécialiste américain du stockage et de la gestion des données basé à San Jose, dans la Silicon Valley. Il propose des services de gestion des données dans le cloud à destination des entreprises.
L’informaticien : Netapp a effectué un certain nombre d’annonces lors de sa conférence qui vient de s’achever à Las Vegas. Quelles sont selon vous les plus importantes et quels sont les axes stratégiques sur lesquels Netapp souhaite se concentrer pour l’avenir ?
Philippe Charpentier : On peut distinguer trois axes principaux. Le premier repose sur le métier historique de Netapp, à savoir l’hybridation entre stockage et données, pour faire en sorte que celles- ci soient disponibles n’importe où et de n’importe quelle manière. Nous avons été le premier acteur à proposer un aspect multiprotocole pour les données, aujourd’hui nous étendons cela au cloud en devenant le seul acteur du marché à proposer notre plateforme de manière native chez les trois grands hyperscalers. Dans cette logique, nous avons également annoncé une baie full flash dédiée au SAN pour notre offre sur site, avec des disques très capacitifs rendant le coût de la plateforme tout à fait abordable.
Le deuxième axe repose sur l’intelligence artificielle, au niveau logiciel avec notre collaboration avec les hyperscalers et au niveau matériel avec Nvidia. Le dernier axe est celui de la cybersécurité, un aspect capital pour nous, étant donné qu’en tant qu’experts du stockage de données, il est très important pour notre image de marque que nos plateformes soient robustes et sécurisées. En outre, dans un contexte où les cyberattaques sont en hausse constante, la question pour nos clients n’est plus si, mais quand ils vont se faire attaquer. Nous nous efforçons donc d’étoffer en permanence notre gamme aussi bien en matière de détection d’attaques que de protection et de remédiation. Nous avons aussi annoncé durant INSIGHT l’extension de notre garantie contre les rançongiciels à l’ensemble de notre gamme.
Quels sont les usages de l’intelligence artificielle autour du stockage et du traitement des données ?
En ouverture de l’événement, George Kurian a cité une récente étude de Google et du BCG montrant que 30% des sociétés orientées vers les données ont un taux de croissance supérieur à 10%, proportion qui tombe à 13% pour les sociétés dont la stratégie n’est pas centrée sur les données. Il y a donc un vrai enjeu de croissance autour de la gestion des données, il s’agit bien d’un sujet de fond et pas seulement d’un effet de mode. Or, l’intelligence artificielle ouvre des perspectives exaltantes dans ce domaine.
De notre côté, notre force repose surtout sur les services autour des données que l’on développe depuis vingt ans, à travers les offres de clonage natives cloud qui permettent de copier des bases de données en quelques secondes au lieu de plusieurs heures, voire plusieurs jours. Nous travaillons actuellement avec une grande banque française qui avait auparavant besoin d’une semaine afin de copier les données nécessaires pour permettre à leurs ingénieurs de réaliser des modélisations, au service de la détection
des fraudes et de l'identification de clients potentiels pour des offres de données. Grâce à notre technologie, ce processus requiert désormais quelques minutes seulement.
Durant l'événement, nous avons annoncé une extension de notre partenariat avec Google à travers Google Cloud Netapp Volumes, offre de stockage de Google basée sur la technologie Netapp. Le tout au service de Vertex AI, qui permet de faire ce que proposent Bard et CHATGPT, mais avec les données d'entreprise. L'important pour nous, c'est d'assurer une bonne intégration entre Vertex AI et le chemin de la donnée, L'IA étant alimentée par des données hébergées sur du stockage Netapp. Nous développons un mécanisme similaire chez nos partenaires AWS et Azure.
Comme vous l’avez esquissé précédemment, vous travaillez sur des applications de L’IA dans le logiciel, mais aussi au niveau du matériel, à travers un partenariat avec Nvidia…
En effet, nous travaillons depuis déjà quelque temps avec Nvidia, nous avons des designs d'architectures qui sont publiés, sommes des acteurs du superpod et standardisons les plateformes Nvidia avec du stockage Netapp. Il y a quelques mois, nous avons développé une nouvelle gamme de plateformes capacitives qui n'étaient pas encore certifiées pour le superPOD, c'était une grosse attente de nos clients qui ont une forte demande de capacité pour L'IA, c'est désormais chose faite.
Nous travaillons par exemple avec Weta FX, entreprise spécialisée dans les effets spéciaux pour films de grosse production. Pour le premier Avatar, elle avait utilisé un peta de données, ce qui était déjà énorme pour l'époque. Sur le dernier film, on est passé à 23 peta ! D'où l'importance des disques capacitifs pour faire des PODS Nvidia, ce n'est pas de L'IA stricto sensu, mais ça s'en rapproche beaucoup dans la mesure où l'on doit manipuler d'immenses quantités de données. Ce que nous mettons en avant, au- delà de la plateforme matérielle, c'est donc notre métier principal, la gestion de la donnée.
Avec l’intelligence artificielle, la cybersécurité est un autre gros sujet du moment, entre le règlement européen Dora et la hausse continue des cyberattaques…
En effet, nous avons également beaucoup de dossiers clients dans ce domaine, avec notamment de la réplication de coffres- forts. Nous constituons de notre côté le dernier rempart, là où l'on stocke la donnée. Une stratégie de cybersécurité comporte trois axes : la détection, la protection et la remédiation. Concernant ce dernier point, il est important de noter que l'impact financier d'une cyberattaque est avant tout dû à l'arrêt de la production qu'elle entraîne, loin devant la rançon. Nous proposons pour cela des solutions embarquées dans la plateforme Netapp, qui peuvent être activées en appuyant simplement sur un bouton.
Concernant la détection, l'idée est de s'appuyer sur L'IA à travers une première phase d'apprentissage. Lorsque la baie de stockage est mise en service, on laisse tourner pendant un ou deux mois un moteur d'apprentissage qui va ainsi apprendre le comportement nominal de la baie. Une fois cette phase effectuée, on devient capable de facilement repérer une déviance par rapport à l'utilisation habituelle de la baie : il peut s'agir d'une grosse quantité de lecture effectuée d'un seul coup lors d'une tentative de vol de données, ou au contraire de beaucoup d'écriture lors d'une tentative de chiffrage.
Une fois l'attaque repérée, ce petit moteur D'IA génère un instantané qu'on rend immuable, même un administrateur ne peut pas le détruire, ce qui est capital étant donné que la première chose que fait une attaque de rançongiciel est de s'en prendre aux instantanés et aux sauvegardes. On peut ainsi détecter plus facilement les attaques et prévenir la récupération, le tout sans avoir besoin de la moindre formation.