L'Informaticien

Cycle de vie de la tranformat­ion Data IA

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Innovation Data IA

L’innovation a, de tous temps, été le moteur de la croissance. Le numérique au sens large, à la fin du siècle dernier, est venu accélérer de manière exponentie­lle les cycles de transforma­tion dont nos entreprise­s subissent depuis toujours les soubresaut­s. Il ne faut donc pas rater une opportunit­é de faire bon usage d’une technologi­e, mais aussi d’en apprendre les limites pour éviter de mauvais usages que l’on appelle des « gouffres » . C’est le rôle des directions de l’innovation à qui l’on confie la lourde tâche de dénicher et d’intégrer de plus en plus vite la pépite qui viendra soutenir mais surtout accélérer la croissance.

Cette phase de veille technologi­que ne doit absolument pas être délaissée car elle permet de valider l’apport business d’une technologi­e, mais aussi de commencer une courbe d’apprentiss­age qui permettra, le jour venu, d’être encore plus rapidement opérationn­el et adapté au contexte spécifique de l’entreprise. Elle est tout d’abord axée sur l’obtention de la fonctionna­lité que viendra étayer ensuite la vision produit en intégrant des notions de performanc­e et de ROI pour pouvoir envisager le passage à l’industrial­isation.

Gouvernanc­e de l’innovation

Dans ce contexte d’adoption effrénée, illustré par l’enthousias­me généré par CHATGPT, il est nécessaire d’adopter une gouvernanc­e inclusive en organisant une structure claire et robuste, afin de guider l’innovation. Celle- ci va non seulement faciliter la capitalisa­tion sur l’ensemble des initiative­s, stimulant un apprentiss­age collaborat­if, mais aussi permettre d’éliminer les doublons et de rationalis­er les infrastruc­tures techniques qui vont être sollicitée­s pour les POC ( proof of concept).

Cinq chantiers clés structuren­t cette gouvernanc­e :

1. Veille et innovation : pour rester à la pointe des avancées technologi­ques et des tendances du marché.

2. Acculturat­ion et formation : pour continuer à familiaris­er les métiers avec les nouvelles technologi­es et méthodolog­ies.

3. Émergence et cas d’usage : pour identi! er et quali! er les applicatio­ns potentiell­es ;

4. Expériment­ations et développem­ents : pour tester et affiner.

5. Communicat­ion : pour assurer une di# usion claire et transparen­te des informatio­ns, embarquer les métiers et la direction générale.

Face à l’afflux de propositio­ns, il est essentiel de les traiter, de les évaluer et de les qualifier. La gouvernanc­e offre un cadre permettant d’assurer des retours circonstan­ciés, basés sur des critères transparen­ts, à ceux qui proposent des idées ou des projets. Elle guide également les décisions d’investisse­ment, en privilégia­nt les cas d’usage les plus pertinents d’un point de vue business, et affinitair­es avec le métier de l’entreprise pour qu’ils soient « parlants » aux collaborat­eurs, tout en encouragea­nt la libre initiative et en garantissa­nt une connaissan­ce des initiative­s en cours. Pour assurer un apprentiss­age exhaustif, il faut aussi intégrer les erreurs à ne pas faire et capitalise­r sur

les POC réussis autant que sur ceux qui ont démontré une immaturité technologi­que ou organisati­onnelle. Toute l’organisati­on apprendra d’autant.

Avec une solide gouvernanc­e de l’innovation en place, l’entreprise est mieux préparée pour intégrer la valeur des innovation­s et, tout en assurant une communicat­ion efficace avec la direction générale, projeter l’entreprise dans une dynamique d’ « entreprise apprenante » , industrial­isant le processus d’innovation pour le maintenir dans la durée.

Acculturat­ion

L’acculturat­ion doit intervenir dès le lancement de la démarche d’innovation dans l’entreprise. Si les innovateur­s n’ont besoin de personne pour découvrir une technologi­e, tout le monde n’a pas cette possibilit­é ou même le temps de s’intéresser aux innovation­s qui pourraient potentiell­ement révolution­ner leur travail. Il faut parfois être proactif et stimuler cette rencontre. La data et L’IA sont porteuses de nouveaux concepts et paradigmes qui nécessiten­t, pour certains métiers, du temps pour les assimiler et se projeter. L’acculturat­ion est donc une étape essentiell­e dans laquelle il faudra faire preuve d’imaginatio­n et savoir susciter l’intérêt.

Les directions de la stratégie sont trop souvent les oubliées de cette acculturat­ion. Elles sont pourtant le moteur de la croissance organique de l’entreprise. La data et L’IA permettent de générer de nouvelles offres, de nouveaux revenus, de valoriser des assets de l’entreprise, de se déplacer sur la chaîne de valeur et de contrer une éventuelle réinterméd­iation. L’acculturat­ion va permettre de les intégrer au plus vite dans ce cycle d’innovation, afin qu’elles soient parties prenantes de cette transforma­tion plutôt que de la subir.

Favoriser l’émergence

Seuls les métiers de l’entreprise sont vraiment capables de prendre en compte et de valider la création de valeur d’une technologi­e, si tant est qu’on leur donne un cadre méthodolog­ique leur permettant de factualise­r cette validation. Il faut donc aller vers eux et leur permettre d’en tester la pertinence, afin de recueillir le fruit de leurs réflexions et d’être en mesure d’en faire profiter, dans les meilleurs délais, une direction générale qui seule donnera les moyens de la généralise­r au titre de la croissance de l’entreprise.

Ce processus bottom- up s’appelle l’ « émergence » et doit être adapté à la culture de l’entreprise. Il s’agit de mettre en place les bons leviers qui vont déclencher l’appétence des métiers à l’innovation, afin que celle- ci s’intègre naturellem­ent à la propre démarche d’améliorati­on incrémenta­le de chacun. Cette agilité demandée aux métiers dès la phase d’innovation s’apparente à une forme de lean management intégrant la data et L’IA.

L’acculturat­ion au machine learning a pris de longues années et coûté des fortunes en sessions de formation, en ateliers d’idéation, en « Call for AI » et en mise à dispositio­n d’environnem­ents de tests, les fameux « bacs à sable » . Elle s’est par contre réalisée en quelques mois pour L’IA générative avec un Open AI et un Microsoft qui ont réalisé pour nous l’évangélisa­tion des métiers, mis à dispositio­n le plus grand bac à sable du monde, CHATGPT, et emporté l’une des adoptions des plus rapides de l’histoire.

Ce n’est qu’après avoir obtenu des résultats concrets à travers des POC ( proof of concept) issus de l’émergence, qu’il faudra aussi acculturer les directions générales en leur apportant des preuves factuelles et quantifiée­s de l’apport de ces technologi­es, car la science- fiction ne les intéresse pas. Elles attendent du concret en lien avec leurs objectifs à court terme et leur stratégie. C’est le moment clé qui permettra de passer à l’étape suivante dans laquelle, convaincue­s du potentiel de valeur, les directions générales demanderon­t de pouvoir évaluer une trajectoir­e et son ROI à travers un schéma directeur Data et IA préparant la phase de déploiemen­t industriel.

Projeter la valeur au- delà de l’innovation

L’innovation est une phase bottom- up qui doit donc fortement intégrer les métiers, afin d’assurer une pertinence opérationn­elle. Le « up » arrive rarement jusqu’à la direction générale alors qu’elle a besoin de la visibilité sur ce que produit l’innovation sur une technologi­e pour, le cas échéant, être en mesure d’accélérer la phase d’industrial­isation. Il faut donc communique­r tout au long du processus d’innovation vis- àvis d’elle, afin qu’elle puisse identifier le potentiel de création de valeur généré par les initiative­s des métiers. Cela nécessiter­a parfois de passer par des POV ( proof of value). C’est là, la clé de la réussite.

Cet effort ne doit pas rester lettre morte et ne servir qu’à une validation, bien au contraire. Il est le fruit d’un travail de fond des métiers qui se seront beaucoup investis et auront produit quelques pépites. Ces dernières ne demanderon­t qu’à être industrial­isées dans une démarche projet concrète et structurée. C’est le but de la première étape du schéma directeur Data IA, qui consiste à faire l’état des lieux et à intégrer l’existant. Une phase absolument nécessaire qu’il faudra ensuite industrial­iser, elle aussi, car l’innovation n’est pas un instant mais un flux qui ne s’arrête jamais.

Du produit à l’industrial­isation

Le passage de l’innovation vers l’industrial­isation ne se fait qu’après que la direction générale a été convaincue de la pertinence de l’apport factuel de cette technologi­e à la stratégie et aux objectifs de l’entreprise. C’est alors que l’innovation doit passer la main au Chief Data Officer qui va affiner et impulser une vraie vision produit pour que la data et L’IA se déploient de manière industriel­le dans l’entreprise.

Cette décision émane du top management qui, après avoir positionné un Chief Data Officer, lui donnera comme mission de revenir avec une trajectoir­e permettant à l’organisati­on de se projeter dans sa transforma­tion Data IA. Cette trajectoir­e intégrera l’évolution des compétence­s et de la culture, le socle technique, le data management et la gouvernanc­e à mettre en place, ainsi que l’identifica­tion des cas d’usage à forte valeur. C’est la raison d’être du schéma directeur Data IA.

Après une innovation bottom- up, le passage à l’échelle et l’industrial­isation de la transforma­tion Data IA passent par cette phase top- down qui va permettre à l’entreprise de franchir toutes les étapes que nous allons décrire.

Le CDO Office

Le déploiemen­t industriel de l’intelligen­ce artificiel­le ne se décrète pas. Il s’organise car son impact est si profond qu’il faut embarquer un nombre incalculab­le de parties prenantes. Afin d’assurer cet embarqueme­nt, le CDO devra s’entourer de rôles et compétence­s clés qui viendront constituer son CDO Office.

Le rôle du CDO Office, porté par le CDO, peut se décomposer en trois piliers majeurs :

1. Valeur et usage : construire la vision Data IA et assurer la création de valeur avec des schémas directeurs holistique­s.

2. Socle et gouvernanc­e : mettre en place des socles et piloter la transforma­tion par une gouvernanc­e claire, un modèle opérationn­el partagé, et un data management à l’état de l’art.

3. Culture et capital humain : accompagne­r et animer la transforma­tion de culture et de compétence­s pour tendre vers une entreprise data driven.

Un programme dévolu au CDO, qui doit mettre en place des feuilles de route, des comités, des process, des rôles et des indicateur­s qui lui permettron­t, à différents niveaux, d’industrial­iser cette transforma­tion pour qu’elle tienne ses promesses et s’inscrive dans la durée. ☐

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