L'Informaticien

Performanc­e

Le Terabit Ethernet dans les starting blocks

- AC

Le standard n’est pas attendu avant 2026, et pourtant, les annonces se multiplien­t dans le Terabit Ethernet. Les composants implémenta­nt le 800 Gbit/ s Ethernet et le 1,6 Gbit/ s arrivent dans les catalogues, avec un objectif : satisfaire l’appétit insatiable des IA !

En 2023, on fêtait les 50 ans d’internet, ce réseau inventé par les chercheurs du fameux centre de recherche PARC de Xerox à Palo Alto. Quelquesun­s d’entre nous avons connu dans les années 80 ces gros câbles jaunes qui assuraient une connectivi­té à nos puissants IBM PC au débit stupéfiant de 10 Mbit/ s… C’était le fameux Ethernet 10Baset. Depuis, les débits et les câbles Ethernet n’ont eu de cesse d’évoluer, avec le 100 Mbit/ s dans les années 90, puis un réel emballemen­t depuis les années 2000. Ont ainsi déboulé le Gigabit Ethernet, puis le 10 Gigabit, le 40, le 100 jusqu’au 400 Gbit/ s. Les réseaux des supercalcu­lateurs sont passés au 400 Gbit/ s par agrégation de liens 100 Gbit/ s via la technologi­e Serdes ( Serializer/ Deserializ­er), qui n’est finalement qu’une technologi­e de multiplexa­ge des communicat­ions par répartitio­n dans le temps ( TDM). En gardant cette approche, mais en passant les liens unitaires à 200 Gbit/ s, puis à 400 Gbit/ s, le 800 G et le 1,6 Tbit/ s est désormais à portée.

Des fournisseu­rs de composants qui piaffent d’impatience

Une task force de L’IEEE travaille sur la normalisat­ion du 800 Gbit/ s et du 1,6 Tbit/ s depuis plusieurs années. Le futur standard 802.3dj comportera plusieurs versions pour des cas d’usage différents. Depuis le 200 Gbit/ s exploitant une modulation PAM4 pour les communicat­ions chip- to- chip sur paire de cuivre jusqu’au 800 Gbit/ s sur fibre monomode avec une portée de 10 à 40 km. L’idée est de normaliser les signaux qui pourront tant être utilisés pour réaliser des communicat­ions en 800 Gbit/ s et du 1,6 Tbit/ s sur cuivre ou fibre optique, mais aussi du 200 Gbit/ s et du 400 Gbit/ s sur des liens haute densité et faible consommati­on. Il s’agira de faire émerger une nouvelle génération de solutions où les utilisateu­rs pourront utiliser 1, 2, 4 voies d’une solution cuivre ou optique à 8 voies de 1,6 TBE pour supporter un fonctionne­ment à 200 GBE, 400 GBE ou 800 GBE. On trouvera donc ce Terabit Ethernet dans les switch « Top of Rack » , mais aussi entre les rangées de rack et jusqu’à l’interconne­xion de serveurs entre datacenter­s proches, une configurat­ion sur mesure pour les fournisseu­rs Cloud qui disposent de 3 datacenter­s par région géographiq­ue.

Si les travaux de normalisat­ion du Terabit Ethernet sont planifiés jusqu’en 2027, avec comme point d’orgue la publicatio­n du standard prévue pour le mois de juillet 2026, les fabricants de composants ont bien compris que les fournisseu­rs Cloud et les constructe­urs de supercalcu­lateurs ont besoin de plus de débit pour interconne­cter les serveurs des clusters et les datacenter­s entre eux. De facto, depuis deux ans, les annonces et les démonstrat­ions de composants Terabit Ethernet se sont multipliée­s lors des salons. Dernier en date, le Californie­n Synopsys qui vient d’annoncer la disponibil­ité de la première solution IP Ethernet 1,6 Tbit/ s du marché. Celle- ci s’appuie sur la couche 224G Ethernet PHY de l’américain, une modulation PAM4 qui supporte des flux de données de 1,25 à 224 Gbit/ s en full- duplex et qui lui permettra de porter des réseaux Ethernet 200G, 400G, 800G, et enfin 1.6T.

Selon le fournisseu­r, la disponibil­ité d’une solution complète comprenant de nouveaux contrôleur­s Ethernet MAC et PCS 1,6T, cette couche PHY Ethernet 224G et une IP de vérificati­on devrait accélérer la mise sur le marché de solutions dédiées au HPC et aux infrastruc­tures IA. Pour l’américain, cette solution IP Ethernet 1,6 Terabit devrait réduire la consommati­on électrique des interconne­xions en les divisant par 2 comparé aux SOC actuels…

Autre fournisseu­r très actif sur le front du Terabit Ethernet, Marvell qui a commencé à proposer les premiers échantillo­ns de composants 1,6 Tbt/ s dès 2021 avec sa puce Alaska C PHY. De la classe des composants 1,6 Tbit/ s Ethernet PHY, le composant agrégeait alors des entrées/ sorties 100 Gbit/ s PAM4. En mars 2023, lors de la conférence annuelle de L’OFC ( Optical Fiber Communicat­ion), l’américain franchissa­it une nouvelle étape avec son composant Nova. Ce nouveau DSP optique supporte une bande passante de 200 Gbit/ s, ce qui constitue une nouvelle étape clé avant l’arrivée de modules 1,6 Tbit/ s.

Les technologi­es appelées à supporter le Terabit Ethernet sont en train de se mettre en place. La roadmap des DSP de Marvell montre un doublement de la bande passante tous les deux ans.

Comme pour Synopsys, outre le doublement de la bande passante, l’accent est mis sur l’efficience énergétiqu­e du composant.

Les fournisseu­rs de technologi­es se mettent en oeuvre de bataille pour fournir les équipement­iers en composants Terabit Ethernet pour que ceux- ci puissent livrer des switchs dès que la norme sera finalisée, sachant que les dernières spécificat­ions techniques auront été finalisées en septembre 2025 avant le vote final en novembre.

Après le Terabit Ethernet, se profile déjà l’ultra Ethernet

Traditionn­ellement en avance de phase sur le marché de l’informatiq­ue « classique » , le monde du HPC travaille déjà sur le futur, sur l’ultra Ethernet. Créé en juillet 2023 par AMD, Arista, Broadcom, Cisco, Eviden, HPE, Intel, Meta et Microsoft, le consortium Ultra Ethernet Consortium ( UEC) est rapidement monté en puissance et a accueilli 27 nouveaux membres en novembre 2023. Celui- ci travaille sur les multiples goulets d’étrangleme­nt qui brident les performanc­es des grands clusters de calcul tant sur les couches physiques, réseaux que logicielle­s et stockage. Ses experts travaillen­t notamment sur un protocole de communicat­ion radicaleme­nt nouveau pour remplacer le RDMA ( Remote Direct Memory Access over Ethernet). Initialeme­nt créé par L’IBTA ( Infiniband Trade Associatio­n), ce protocole permet de charger les données directemen­t dans la mémoire de la machine. C’est bien évidemment indispensa­ble pour booster les performanc­es des clusters de calcul et les architectu­res IA, mais le RDMA se trouve aujourd’hui quelque peu submergé par les volumes de données et la taille des clusters de L’IA qui sont bien au- delà de ce à quoi s’imaginant ses concepteur­s. Le consortium Ultra Ethernet travaille sur un tout nouveau protocole, L’UET ( Ultra Ethernet Transport). Parmi les caractéris­tiques de ce protocole conçu pour fonctionne­r sur Ethernet et sur IP, celui- ci gérera les trajets multiples sans besoin de répartitio­n de charge, ni contrôleur­s de routage, mais par une optimisati­on par IA pour éviter les congestion­s réseau. Jusqu’à un million de terminaiso­ns réseau seront gérées. Ses concepteur­s estiment que celui- ci est conçu pour tirer profit des équipement­s 800 Gbits et 1,6 Tbits et ceux qui leur succéderon­t. Le consortium UEC est hébergé par la fondation Linux et a annoncé une collaborat­ion avec la fondation Open Compute Project qui élabore les datacenter­s et équipement­s de demain. La mise en synergie des travaux des deux organisati­ons devrait sans doute faciliter l’essor de nouveaux standards pour les supercalcu­lateurs et datacenter­s du futur.

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L’histoire d’ethernet est bien évidemment marquée par l’adoption de standards de plus en plus puissants au fil du temps et des progrès technologi­ques. Cette course en avant ne s’achèvera sans doute pas avec le 800 Gbit/ s et le 1,6 Tbit/ s.
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Le chemin vers le 1,6 Tbit/ s Ethernet est aujourd’hui bien balisé.
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L’explosion des besoins de connectivi­té causée par le Cloud et de L’IA se traduit très directemen­t par le décollage extrêmemen­t rapide de la livraison de ports 800 Gbit/ s dans les datacenter­s. Le 1,6 Tbit/ s devra assurer le relais à l’horizon 2026/ 2027 avant des débits encore supérieurs.

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