Le Mozart du jazz
PAR JOEY ALEXANDER (MOTÉMA). EN CONCERT À JAZZ IN MARCIAC, LE 10 AOÛT.
Ce gamin est un grand. Il a 12 ans, vient de Jakarta, en Indonésie, et il est pianiste de jazz. Ce n’est pas qu’il ait fait la une du « New York Times » qui est notable, mais plutôt qu’il l’ait méritée. Wynton Marsalis l’appelle son « héros ». Comme tous les enfants prodiges, Joey Alexander est troublant, il fait bouger les lignes : trop petit pour son grand piano, trop petit pour ses grands partenaires, trop petit pour jouer dans des clubs. On ne sait plus où on en est. Seulement voilà : il ne joue pas « aussi bien » que les grands, ce qui su rait à vous épater, mais mieux que beaucoup d’entre eux. Plus imaginatif, plus concentré, plus libre. Ce qu’il fait, qui s’apparente stylistiquement à Duke Ellington (et aussi à Bill Evans, Herbie Hancock ou Phineas Newborn), est d’une sûreté rythmique et d’une subtilité harmonique stupéfiantes (pour son âge), et surtout enthousiasmantes (pour ce que c’est, en soi). La vitesse de la pensée, l’écoute des partenaires, l’immédiateté de sa réaction à ce qu’ils proposent, mais aussi l’invention, la science du développement – tout cela vous soulève. Ce n’est pas tous les jours qu’on découvre un prodige prodigieux.
Pour tout arranger, il n’a pas été précoce. Il n’a touché son premier clavier qu’à 6 ans. Né Josiah Alexander Sila, à Bali, d’un père et d’une mère voyagistes, il a une grosse tignasse, des lunettes de philosophe existentialiste, et un sourire désarmant. A 8 ans, il joue pour Herbie Hancock : « J’ai décidé ce jour-là de consacrer mon enfance au jazz », raconte-t-il drôlement. Il est à l’école en ligne, car il est né avec internet. Il lui manque la