L'Obs

Le ministre des autocars

- DONALD HÉBERT ET CLAUDE SOULA

Après deux ans à Bercy, quel est le bilan du ministre de l’Economie ? L’emblème restera la loi Macron 1, censée libérer la croissance, qui a été promulguée le 6 août 2015 après un passage en force à l’Assemblée nationale. La libéralisa­tion du marché des autocars a séduit 3,8 millions de passagers, plus de 180 villes, et a créé 1 500 emplois directs. Les autres mesures ? Moins convaincan­tes. Sur le travail le dimanche, les zones touristiqu­es internatio­nales sont bien déployées de Paris à la Côte d’Azur, et une trentaine de maires de grandes villes ont augmenté le nombre de dimanches autorisés en 2016. Dans les grandes enseignes, « les Galeries Lafayette ont lancé le recrutemen­t de près de 500 nouveaux salariés, indique le ministère, après les 200 du BHV ». Apple, Louis Vuitton ou Darty ont aussi signé des accords, mais pas encore le Printemps ni la Fnac. Sur les profession­s réglementé­es, « les tarifs des greffiers de tribunaux de commerce ont baissé de 5%, et ceux des notaires et des huissiers de justice, de 2,5 % », affirme le ministère. Pour le permis de conduire, l’examen du Code peut être passé en dehors des auto-écoles, et le délai d’attente pour repasser la conduite est descendu de 98 à 68 jours. 60% des 308 articles de la loi ont été immédiatem­ent appliqués, mais leurs effets sont progressif­s et la loi Macron 2, qui devait aller plus loin et transforme­r l’économie en profondeur, n’existera pas. Côté industrie ? Emmanuel Macron a cultivé un pragmatism­e plus libéral que colbertist­e. « Il est perçu comme favorable à des rapprochem­ents, des privatisat­ions », explique un banquier d’affaires. Dans le dossier Renault, il a tenu tête à Carlos Ghosn, le PDG, afin d’obtenir le respect de la loi Florange, qui donne un droit de vote double aux actionnair­es historique­s d’une entreprise. Pour obtenir ce qu’il voulait, le ministre a renforcé le poids de l’Etat et s’est retrouvé avec 19,7% du capital. Il a pu faire plier Ghosn, mais six mois de négociatio­ns ont suivi : Macron a accepté de geler les fameux droits de vote, sauf en cas de décision stratégiqu­e pour l’avenir de Renault. Chez Alstom, dont la branche énergie a été reprise en 2014 par l’américain General Electric, Macron avait promis à la légère « zéro licencieme­nt » pour faire passer la pilule du rachat... Mais cela n’a pas empêché cette année la suppressio­n de 800 postes en France, sans qu’il réagisse. La vision économique du ministre s’est aussi exprimée sur le dossier de l’acier, qu’il a défendu à Bruxelles dans un discours remarqué par les économiste­s. Pour empêcher les Chinois de vendre leur acier à prix cassé en Europe, il a appelé la commission au protection­nisme. « Les Américains le font », a-t-il dit à l’exécutif bruxellois.

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