SPÉCIAL ÉTATS-UNIS
Pourquoi des dizaines de millions d’électeurs s’apprêtent-ils à voter pour le populiste et misogyne Donald Trump? Notre correspondant Philippe Boulet-Gercourt a sillonné le pays, d’ouest en est, pour percer ce mystère. Il ne s’agit pas d’une mauvaise fièvre. La démocratie américaine est malade. En cas de victoire, Hillary Clinton devra trouver le remède.
Si seulement c’était une mauvaise fièvre. Un abcès purulent qui crèverait le 8 novembre au soir. L’Amérique se relèverait, s’époussetterait et repartirait de l’avant. Cela s’est vu dans le passé : la paix après la Sécession, le calme après la tempête maccarthyste; l’Amérique est un pays résilient. Et pourtant, cette fois, on a du mal à chasser de son esprit cette petite musique : quelque chose a changé, quelque chose de profond et de durable. La première démocratie mondiale est malade. Pas son économie, terriblement inégalitaire mais qui reste une locomotive efficace du capitalisme mondial. Pas sa culture, qui vient de fournir un prix Nobel épatant à la littérature. Pas sa population, plus diverse et bigarrée que jamais. Non, ce sont les piliers mêmes de la démocratie qui, avec Donald Trump, se sont brutalement dérobés sous les pieds de l’Amérique. Le mythe orgueilleux de la « destinée manifeste » a été remplacé par une guerre de tranchées sans merci entre deux Amérique qui se haïssent un peu plus chaque jour.