Le temps des révolutions
SOULÈVEMENTS. JUSQU’AU 15 JANVIER, JEU DE PAUME, RENS. : WWW.JEUDEPAUME.ORG. CATALOGUE DE L’EXPO, GALLIMARD/JEU DE PAUME, 422 P., 49 EUROS.
Alors on se soulève au Jeu de Paume ? La question est en effet posée à travers une exposition hors norme dont le commissariat a été confié au philosophe et historien de l’art Georges Didi-Huberman. Hors norme parce qu’il ne s’agit pas ici d’établir une cartographie ou une chronologie des révoltes ayant secoué la planète, mais plutôt d’en proposer une approche protéiforme. Photographies, documents, manuscrits d’écrivain, films, tableaux, gravures et dessins mettent en lumière le sens même du mot et ses différentes implications, qu’elles soient physiques (un corps ou un objet soustrait à la pesanteur terrestre), sociales (la rébellion contre un pouvoir) ou artistiques. Dans ce parcours très dense, l’insolite côtoie l’histoire, depuis le xixe siècle jusqu’à nos jours. L’insolite, à l’image de cette photographie de Lisette Model (« Metropole Cafe, New York ») montrant une chanteuse les cheveux dressés sur la tête, ou encore de ce marteau au manche brisé qu’Antonin Artaud utilisait pour « marteler » sa diction. L’histoire, elle, est omniprésente, depuis les images des ruines de la Commune de Paris jusqu’au portrait d’un Rudi Dutschke (leader du mouvement étudiant allemand, victime d’un attentat en 1968), que Wolf Vostell représente bâillonné. C’est aussi l’hommage de Pascal Convert dont l’installation (« Soulèvement ») vient évoquer trois figures de la Résistance (Paul VaillantCouturier, Charles Michels, JeanPierre Timbaud). L’humour et la provocation ne sont pas absentes de cette exposition stimulante, à preuve cette oeuvre de Sigmar Polke qui proclame tout de go : « Contre les deux superpuissances. Pour une Suisse rouge ». Une Suisse rouge, ça serait beau.