La fin de la mondialisation ?
A l’écoute des électeurs frappés par la désindustrialisation des Etats-Unis, Trump a promis de s’attaquer à la globalisation, déjà bousculée partout dans le monde par la montée du protectionnisme et le ralentissement économique
non, Donald Trump ne fera pas ratifier l’accord de partenariat transpacifique, qui devait faciliter le commerce entre douze pays confrontés à la puissance économique chinoise (dont l’Australie, le Japon, le Pérou, le Vietnam…). Non, il ne continuera pas les discussions sur le Tafta, accord de libre-échange entre les EtatsUnis et l’Europe. Oui, il est prêt à remettre en question l’Aléna, ce traité qui a donné naissance en 1994 au grand marché unique allant du Mexique à l’Alaska. Oui, il pourrait mettre la Chine au ban de la communauté commerciale en l’accusant de « manipulation déloyale de sa monnaie ». Il a même assuré qu’il le ferait au « day one », à son premier jour à la Maison-Blanche. Il promet aussi d’imposer 45% de droits de douane aux produits chinois, et 35% aux biens fabriqués au Mexique pour le compte de groupes américains. C’est en tout cas ce qu’il a martelé tout au long de sa campagne. Mais jusqu’où ira le prochain président des Etats-Unis une fois aux commandes ?
Donald Trump est clair : il veut siffler la fin de la mondialisation, refermer la parenthèse de ce mouvement lancé par Ronald Reagan, avec la complicité de Margaret Thatcher, au début des années 1980. Pour financer les déficits américains, il a favorisé une libéralisation financière et un libre-échange qui ont complètement transformé la planète. Avec un bilan globalement positif : la proportion de pauvres dans la population mondiale a été divisée par quatre. Mais aussi un inconvénient majeur : les inégalités à l’intérieur des pays ont explosé, et certains territoires des Etats développés ont perdu leur prospérité sans que personne s’en soucie vraiment…
Il a fallu du temps pour que les économistes, convaincus des vertus globales du libre-échange, regardent de plus près les dommages collatéraux. Professeur au MIT, David Autor ausculte depuis quelques années les bassins d’emploi aux Etats-Unis les plus touchés par les importations chinoises. Ses recherches montrent qu’entre 1999 et 2011 le déferlement de produits asiatiques aurait entraîné la perte de plus de deux millions d’emplois. Et, une fois les usines fermées, le choc ne s’estompe pas. Dix ans plus tard, le marché du travail reste très déprimé. Les conséquences politiques sont nettes. L’électorat de ces territoires s’est polarisé sur Trump, le seul qui promette d’apporter une réponse à leur problème. Les mêmes causes provoquant les mêmes effets, le vote en faveur du Brexit l’a emporté quelques mois auparavant au RoyaumeUni. Puisque cette Union européenne ne nous profite pas, autant en sortir, a répondu une majorité d’électeurs britanniques, secouant comme jamais le projet d’intégration économique le plus avancé de l’histoire.
Est-ce la fin de cette « Terre plate », avec des chaînes de production mondialisées, sans frontières, décrite en 2005 par l’éditorialiste du « New York Times » Thomas Friedman dans un livre à grand succès (1) ? Le début du mouvement de « démondialisation » préconisé par Arnaud Montebourg dans son ouvrage de 2011 (2) ? La « déglobalisation » dont on parle dans les salles de marché depuis quelques mois en essayant de mesurer son impact sur les cours de Bourse des multinationales ?
« En réalité, la mondialisation est terminée, note l’économiste Daniel Cohen, proche de Martine Aubry. Car ce qui devait être fait a déjà été fait. » Les machines et les chaînes de production nécessitant une forte main-d’oeuvre sont parties dans les pays d’Asie, au Mexique, en Europe centrale ou en Turquie. « On verra encore