L'Obs

FOG part en croisade

Avec Tiphanie, dite “Belle d’amour”, Franz-Olivier Giesbert embarque pour le Moyen Age sans quitter notre époque. Trépidant et édifiant

- BELLE D’AMOUR, PAR FRANZ-OLIVIER GIESBERT, GALLIMARD, 384 P., 21 EUROS. CLAIRE JULLIARD

Ode au « merveilleu­x Moyen Age », où règne encore cet esprit d’enfance qui nous fait tant défaut, le roman de Franz-Olivier Giesbert met en scène, sous la plume d’un professeur médiéviste, l’épopée de Tiphanie, dite “Belle d’amour”. Après le meurtre de ses parents, elle parcourt les routes de France affublée de guenilles pour dégoûter les hommes, tout comme Peau d’âne. Elle n’en tombera pas moins sous la coupe de l’effrayant Charles Jean-Bon et subira ses assauts avant de renaître aux côtés d’Enguerrand Sauveterre, pourtant bourreau de son état. Au lendemain de leurs noces, les jeunes mariés répondent à l’appel des croisés. Ils s’embarquent pour la Terre sainte dans le sillage du bon Louis IX et de son cher Joinville. Les talents de guérisseus­e de Tiphanie lui valent la confiance du monarque. Elle entre à son service. Commence pour elle une nouvelle vie d’exaltation­s, d’effrois et aussi d’amours, puisqu’elle succombera au charme singulier de l’eunuque Malek.

Epris de sa belle intrépide, FOG la suit dans une série d’épisodes voluptueux ou dramatique­s. L’occasion pour lui de revenir sur l’une de ses passions, l’histoire des croisades. Son narrateur entrecoupe le récit de tableaux du monde durant cette époque enflammée. Jérusalem attise toutes les convoitise­s. Au nom de Dieu, chrétiens et mahométans se livrent des combats sanglants. Le roman met en perspectiv­e ce fascinant Moyen Age et la période contempora­ine. Il y est déjà question du sort tragique des chrétiens d’Orient, du statut infamant des juifs de France, de la secte des Assassins, les premiers terroriste­s islamiques qui appelaient la mort de leurs voeux. Les exactions d’hier et celles d’aujourd’hui se répondent dans ce livre trépidant, à la fois fabliau et essai, grave et tonique, où Giesbert fait chanter la langue d’antan. Les gens y fatrouille­nt (bavardent) en écoutant la rimerie des troubadour­s, les amants y font la chosette. On y rappelle enfin que « la vie est quand même une farcerie ».

Newspapers in French

Newspapers from France