L'Obs

Un photograph­e de l’ère atomique

TAKASHI ARAI. CENT SOLEILS. GALERIE CAMERA OBSCURA, PARIS14E ; 0145456708. JUSQU’AU 27 MAI.

- BERNARD GÉNIÈS

Quelles raisons peuvent inciter un jeune photograph­e japonais à faire de la photograph­ie en utilisant le plus ancien de ses procédés ? Takashi Arai, 38 ans, n’a rien d’un nostalgiqu­e. S’il réalise aujourd’hui des daguerréot­ypes, c’est tout simplement parce qu’il estime que cette technique lui permet de mener un véritable travail d’artiste. Scientifiq­ue de formation (il a suivi des études de biologie), il a composé une série de clichés consacrés au Japon d’aujourd’hui. Ses vues de Nagasaki et de Hiroshima ne sont pas anodines. Sur l’une d’entre elles, le soleil qui brille dans le ciel (il apparaît ici en bleu) se trouve à une altitude apparente de 570 mètres, soit exactement celle à laquelle se trouvait le bombardier américain qui a largué la bombe atomique sur Hiroshima le 6 août 1945. Arai a également photograph­ié les zones sinistrées du tremblemen­t de terre survenu en 2011, se rendant par ailleurs sur le site de la centrale de Fukushima – qu’il a photograph­ié depuis la mer.

Le recours au daguerréot­ype permet au photograph­e d’obtenir des images troublante­s d’une définition remarquabl­e, monuments et personnage­s paraissant parfois surgir en relief du support – une plaque recouverte d’argent, polie comme un miroir. Dans une deuxième salle de la galerie, on découvrira un très bel ensemble de petits clichés de format 6×6 : Takashi Arai en prend un par jour (d’où le titre de la série, « Daily DType »), constituan­t un journal de bord entre intimisme et insolite. Photograph­e de l’ère nucléaire, Takashi Arai vient de faire son entrée dans la cour des grands.

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