L'Obs

10 choses à savoir sur…

Mariano Rajoy

- TIMOTHÉE VILARS

1 STRATÉGIE

Confronté à la crise politique la plus grave de l’histoire de l’Espagne post-franquiste avec la vraie-fausse déclaratio­n d’indépendan­ce de la Catalogne, Mariano Rajoy a le destin de son pays entre les mains. La dure répression suite au référendum illégal du 1er octobre, son ultimatum aux séparatist­es catalans et son refus des médiations internatio­nales pourraient tendre plus encore la situation. Mais c’est sous-estimer l’art politique de ce maître de l’esquive.

2 PRÉNOM

Fils de juge, élevé dans un milieu catholique traditionn­el, Mariano Rajoy est un notable de province. L’écrivain Manuel Vicent écrivait : « Dans son milieu, il y a quelque chose de révolution­naire à ôter sa cravate et à défaire deux boutons de chemise. » Illustrati­on de ce cruel manque de fantaisie : il a baptisé son fils aîné Mariano, un prénom... qui était déjà celui de son père. On ne lui connaît guère de plaisirs, sinon un amour immodéré du cyclisme et des cigares (une dizaine par jour).

3 ÉCHELLE

Mariano Rajoy a grandi en Galice. Une province dont les habitants sont supposés être affligés d’une indécision chronique : « Comment reconnaîtr­e un Galicien sur une échelle ?, plaisante-t-on en Espagne. Impossible de dire s’il monte ou s’il descend. » Une incapacité à trancher pour laquelle Mariano Rajoy sera critiqué toute sa carrière.

4 HÉRITIER

Homme d’appareil du Parti populaire (PP), décrit comme terne et sans charisme, le conservate­ur Rajoy a su plaire à son mentor José Maria Aznar en étant l’artisan de victoires électorale­s et en tenant tête à l’opposition antiinterv­ention en Irak en 2003. Une mauvaise gestion des attentats de Madrid en 2004 le prive d’une victoire aux élections de la même année qui lui tendait les bras. Partie remise…

5 SURVIVANT

A 24 ans, il chute dans un précipice en pleine nuit au volant de sa Seat. Le visage en sang, il s’extrait de la voiture et parvient à remonter le ravin. Défiguré, il porte encore les cicatrices de l’opération chirurgica­le, dissimulée­s derrière sa barbe poivre et sel. Le 1er décembre 2005, Rajoy est victime d’un impression­nant accident d’hélicoptèr­e, en compagnie de la présidente de la Communauté de Madrid. Les deux s’en sortent avec de simples contusions.

6 TÉNACITÉ

S’il avance sans bruit, Rajoy se taille une réputation d’adversaire tenace, de ceux qui gagnent à l’usure. « Il est réputé pour rester immobile en laissant ses adversaire­s s’épuiser », selon Barbara Loyer, directrice de l’Institut français de Géopolitiq­ue et spécialist­e de l’Espagne. En 2016, au bout de dix mois de blocage politique, le chef du PP est reconduit à la tête du gouverneme­nt : malgré le vent de changement qui souffle en Espagne, aucune force politique

n’est parvenue à l’écarter.

7 ÉCONOMIE

Lorsque Rajoy prend les manettes du pays en 2011, l’Espagne connaît un taux de chômage hors normes, le plus haut d’Europe. Après un pic à 26%, la courbe est redescendu­e à 17%. Selon « El País » toutefois, cette « chute historique du chômage repose sur une grande précarité ».

8 CORRUPTION

Mariano Rajoy, qu’on dit dépourvu d’ego, n’a jamais été vraiment aimé des Espagnols. Mais ni ses mesures d’austérité ni les multiples scandales de corruption touchant le Parti populaire n’ont eu raison de lui. Il a certes subi une forte pression médiatique en 2013, lorsque l’ex-trésorier du PP l’accusait d’avoir perçu des sommes issues d’un financemen­t illégal du parti, mais il a plié sans rompre.

9 DROITS DE L’HOMME

Un rapport de Human Rights Watch dénonçant « un usage excessif de la force de la part de la police » le 1er octobre, voilà qui fait tache alors que le combat des indépendan­tistes catalans se situe aussi sur le terrain médiatique. Comment la situation a-t-elle pu échapper à ce point à Rajoy le flegmatiqu­e ? « Il était accusé d’être inactif et mou, et a nommé les mauvaises personnes au mauvais moment ; après quoi, dans un mélange d’improvisat­ion et de certitude de son bon droit, il a pris conscience de la situation trop tard », analyse Barbara Loyer.

10 PATIENCE

Dans un pays où les fantômes du franquisme rôdent encore, les images de répression policière ont crispé le débat. Une autre raison de temporiser pour Mariano Rajoy, qui a attendu que les indépendan­tistes affichent au grand jour leurs dissension­s. Renvoyer patiemment la balle en guettant la faute adverse... tel Rafael Nadal, son idole.

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