Bertrand Belin sort enfin de l’ombre
Après quinze ans d’une carrière prometteuse mais discrète, BERTRAND BELIN sort enfin de l’ombre avec un ALBUM et un ROMAN. Rencontre
Longtemps, Bertrand Belin a été un petit Bashung, jusque dans les intonations de sa voix, sans que rien ne modifie cette image un peu laborieuse de dandy rocker. Mais il faut l’admettre : pendant ce temps, alors que le nom de Belin sonnait surtout l’heure de l’apéritif pour la plupart des Français, certains croyaient en lui, si bien qu’à 48 ans il totalise quinze ans de carrière solo, soit six albums, des centaines de concerts, un petit essai intitulé « Sorties de route » (La Machine à cailloux, 2011), des romans publiés chez P.O.L, et quelques musiques de film (dont, tout récemment, celle de « Ma vie avec James Dean », de Dominique Choisy). Le chanteur de « Perdue » et de « Hypernuit » a ses fans, c’est un fait. Et aujourd’hui, Belin sort en même temps un roman, « Grands Carnivores », et un album, « Persona ». Rien ne les rapproche a priori, sinon la nécessité d’écrire, de créer. Rien? Ça reste à voir.
Bien que leur auteur soit assez drôle, la noirceur de cet élégant quadragénaire éclate vite quand on le rencontre. Pour en toucher le fond, il faut rouvrir les volets de la demeure familiale des Belin, à Quiberon : une maison pleine de frères et de soeurs, avec une mère esclave au foyer, et un père tantôt marin et tantôt rien. « Mon enfance est un théâtre de misère sociale, de violence et d’alcool, dit Bertrand Belin. On ne peut pas dire que c’était joyeux, mais comme toujours dans les situations très adverses, il y avait des plaisirs solitaires. Je ne parle pas d’onanisme, mais d’un monde intérieur où s’exprime la joie. La nature était un immense terrain de jeu : la mer, les rochers, la plage, la campagne aussi. »