“CERTAINS DE CES SALAIRES SONT DIFFICILES À JUSTIFIER”
Secrétaire d’Etat au Budget, vous avez fixé les rémunérations de centaines de hauts responsables publics. Comment procédiez-vous ?
Tous les jours ou presque, je signais les lettres fixant les salaires des patrons d’organismes publics aussi divers que l’Opéra de Paris, les Agences régionales de Santé, les parcs nationaux ou les autorités indépendantes. Les ministres de tutelle me faisaient des propositions et il me revenait, avec l’aide de mon cabinet, d’accepter, ou non, les montants demandés. J’avais le dernier mot, puisque c’est Bercy qui verse le salaire…
Sur quels critères décidiez-vous ?
Mon cabinet prenait en compte le salaire du prédécesseur et celui de la personne choisie dans son dernier poste. Puis nous faisions un mix des deux. Le président de la République et le Premier ministre vous ont-ils demandé d’accepter certains salaires que vous jugiez pourtant trop élevés ?
C’est arrivé, en effet, à de rares reprises.
Vous qui n’êtes pas haut fonctionnaire mais enseignant, avezvous été surpris, en arrivant à Bercy, du montant de ces rémunérations ? Oui, bien sûr. J’avais été député et même rapporteur général de la Commission des Finances à l’Assemblée, mais j’ignorais que certains cadres supérieurs de l’Etat percevaient de tels salaires, souvent choquants. La plupart d’ailleurs gagnaient largement plus que moi, le secrétaire d’Etat au Budget, dont les émoluments n’étaient « que » de 7 050 euros net par mois soit deux à trois fois moins que les leurs !
Vous trouvez ces salaires trop élevés ?
Oui, souvent on peine à trouver une justification à de tels montants, comme par exemple les salaires des ex-TPG, les directeurs départementaux des Finances publiques. Mais il arrive aussi que, pour certains postes très spécialisés, la concurrence avec le privé justifie des niveaux élevés. A Bercy, par exemple, nous peinions à recruter de bons spécialistes de l’optimisation fiscale parce qu’ils sont très bien payés dans les cabinets spécialisés qui les débauchent. Du coup, la lutte contre l’évasion fiscale est moins efficace.