L’ENVIRONNEMENT,LA NON AFFAIRE DU SIÈCLE ?
N’ayant pas toujours mauvais esprit, j’évite de tirer des conclusions définitives de ce qui peut ne relever que de coïncidences. Ces derniers jours, cependant, à propos d’environnement et de la politique menée par Emmanuel Macron, trois événements ont rudoyé mes préventions.
1. Le 14 février, l’Elysée annonce le maintien à la tête d’EDF de Jean-Bernard Lévy. Homme honnête, sans doute, grand patron peut-être, mais pour ce qui est du « nouveau monde », on repassera. Très sceptique quant à la compétitivité des énergies renouvelables, balayant d’un revers de la main les prévisions de RTE (Réseau de Transport d’Electricité) sur la baisse de la demande d’électricité en France et en Europe (essentiellement grâce aux stratégies d’e cacité énergétique), le héraut du nucléaire me déclarait début décembre, devant témoin, dans les couloirs de France-Inter : « Mais… oui, le lobby du nucléaire a gagné! Et alors ? » Ou encore : « Des EPR, on en vend partout ! Et on va en mettre plusieurs en France. »
La réalité, c’est que « partout » où elle a réussi à en vendre – en Chine, en Finlande ou en Grande-Bretagne –, EDF accuse des retards de plusieurs années pour la mise en route de ses réacteurs EPR et des dépassements de plusieurs centaines de millions d’euros, voire de milliards. Prenez Flamanville : son budget est passé de 3 à 11 milliards, sa livraison a pris au moins huit ans de retard! Mais oui, le gouvernement l’a depuis confirmé, par exemple avec sa programmation pluriannuelle de l’énergie : le lobby du nucléaire a gagné, malgré le danger de cette énergie et ses déchets toxiques.
2. Le 15 février, le ministère de la Transition écologique et solidaire oppose une fin de non-recevoir aux porteurs du recours en justice nommé « l’A aire du siècle ».
« L’A aire du siècle »? Quatre ONG attaquent l’Etat en justice pour « inaction climatique », soutenues par plus de 2 millions de citoyens et citoyennes. Mais François de Rugy leur enjoint, sur dix pages tru ées de flous et d’autant de loups, de circuler : la France en ferait déjà assez. Pourtant, le même ministre se félicite que la « jeunesse » s’empare du sujet du climat. Pourtant, nos émissions de gaz à e et de serre sont en hausse depuis trois ans. Pourtant, la France vient d’être quatre fois mise en demeure par Bruxelles, pour non-respect des directives environnementales, notamment concernant la lutte contre la pollution de l’air et le développement des énergies renouvelables! Pourtant, à l’automne dernier, un rapport de l’Institut du Développement durable et des Relations internationales (Iddri), organisme de confiance, pointait les retards coupables de la France en matière de transition écologique, pour les secteurs de l’énergie, du bâtiment, des transports ou de l’agriculture…
3. Last but not least, l’o ensive de Bercy pour faire bénéficier les véhicules diesel récents de la vignette « Crit’air 1 », au motif qu’ils seraient aussi « propres » que les véhicules à essence récents et qu’il faut « sauver la filière diesel ». Le hic? Ils produisent, c’est documenté, des particules cancérigènes plus fines, donc plus dangereuses que celles de leurs prédécesseurs ; ils émettent en quantité du dioxyde d’azote, plus nocif que le CO2 ; ils provoquent des maladies respiratoires, singulièrement chez les enfants et les personnes âgées; ils amplifient le phénomène de réchau ement climatique…
Ajoutez-y l’enterrement par l’Elysée d’une reprise de la trajectoire carbone, censée pénaliser le diesel, et surgit l’interrogation. A l’instar de l’un de ses prédécesseurs, Emmanuel Macron ne serait-il pas en train de nous dire que, pour lui, « l’environnement, ça commence à bien faire » ?