FAUT-IL DÉVELOPPER LA TÉLÉMÉDECINE ?
Le désert médical français se dotera-t-il d’oasis numériques ? Le projet de loi de réforme du système de santé, présenté en Conseil des ministres le 13 février, entend étendre les pratiques de télésanté : des actes de soin réalisés par écrans interposés. Les infirmiers, les pharmaciens ou encore les orthophonistes sont cités par le gouvernement comme les nouvelles professions concernées. La panacée face à l’exode sans fin des médecins de campagne, ou un cautère sur une jambe de bois ? Vingt-cinq ans après les premières expérimentations, la pratique de la téléconsultation,
bien que remboursée par l’assurance-maladie depuis septembre dernier, reste
« marginale » en France selon la Cour des Comptes. Mais c’est ignorer les nouveaux acteurs qui arrivent sur un « marché » promis à une forte croissance : une dizaine de sites internet se disputent déjà le gâteau, et le géant de la prise de rendez-vous médicaux en ligne, Doctolib, s’est lancé sur le secteur en janvier. L’Ordre des Médecins pointe même les risques d’« ubérisation » du système de santé, ciblant les pratiques publicitaires de plateformes comme la société Qare, et rappelant que
« la médecine ne doit pas être exercée comme un commerce ».
Outre ce besoin de régulation, beaucoup de praticiens rechignent aussi à voir des patients de zones rurales aller se faire soigner en cabine, contraints par l’isolement géographique. Comme tous les métiers en période de restriction des moyens, la médecine se pose aujourd’hui la question de sa propre déshumanisation.