Les trois soeurs
LES SOEURS AUX YEUX BLEUS, PAR MARIE SIZUN, ARLÉA, 390 P., 20 EUROS.
Marie Sizun (photo) ne pensait pas se lancer dans une saga. C’est pourtant ce qu’elle a fait en reprenant dans ces « Soeurs aux yeux bleus » les personnages de « la Gouvernante suédoise » (Folio). Le drame qui s’y jouait est résumé au début du volume. En 1877, Hulda, l’épouse suédoise de Léonard Sézeneau, vient de mourir d’épuisement physique et moral après avoir découvert la liaison qu’entretenait son mari avec Livia, la gouvernante. Traumatisés par le deuil, les cinq enfants s’apprêtent à quitter l’étrange maison de Meudon. Léonard envoie ses deux fils en pension mais, incapable de se séparer des ses filles, il les emmène, ainsi que Livia, à Saint-Pétersbourg. Sous la coupe de ce père aimé mais abusif, Louise, Eugénie et Alice peinent à imposer leur personnalité. Puisque Livia a volé la place de leur mère, elles entrent en guerre contre elle. Sans imaginer tout ce que la jeune femme a sacrifié pour Léonard et ses enfants. La grâce de ce roman ample et charpenté réside dans l’évanescente fluidité de son écriture, dans les portraits de trois soeurs aux destins contrariés qu’on suit jusqu’en 1939. Entre fiction et autobiographie familiale, une chronique dix-neuviémiste sur la difficile émancipation féminine.