La fin de la hausse ?
L’envolée des prix de la pierre limite les opérations d’investissement. Mais certains annoncent déjà un atterrissage. Reste à bien choisir son placement
L’immobilier permet de se constituer un patrimoine au long cours, sans s’exposer aux aléas des marchés financiers, avec un atout précieux : il peut se financer entièrement à crédit. Et le moment est propice : en février, le niveau des taux d’intérêt des crédits reste encore bas. « Même si certaines banques ont décidé de relever légèrement leur barème, elles sont une majorité à jouer le statu quo. Le taux moyen reste inchangé, à 1,40% sur quinze ans, à 1,60% sur vingt ans et à 1,80% sur vingt-cinq ans, précise Maël Bernier, porte-parole de Meilleurtaux.com. Cette situation devrait perdurer pendant encore au moins six mois et sans doute au-delà. De plus, les candidats au financement disposent d’une offre bancaire vaste et variée. » Toutefois, la décision d’investissement se révèle plus délicate à prendre que les précédentes années. Car les prix s’envolent. Malgré un « ralentissement de la hausse », le mètre carré au niveau national a, selon la Fnaim, renchéri de 2,7% en 2018 (3,8% pour les appartements et 1,5% pour les maisons) – sans parler
de Paris, qui va de record en record. En 2019, le département des études économiques du Crédit agricole chi re cette progression nationale autour de 2%. Reste que, avec un marché immobilier sous l’épée de Damoclès d’un possible relèvement des taux, certains observateurs commencent à évoquer la fin du cycle haussier.
Des dispositifs incitatifs
Pour ceux qui veulent acheter sans subir l’érosion du pouvoir d’achat (1,4 mètre carré de surface en moins en 2018 pour la même mise de fonds), la seule parade possible consiste aujourd’hui à opter pour un prêt plus long. Les derniers chi res de l’Observatoire du Crédit Logement/CSA indiquent que les ménages se sont endettés, en 2018, sur près de dix-neuf ans ! Amorcé en 2014, cet allongement s’est même accru ces deux dernières années.
Quant au rendement locatif moyen, qui s’étiole pour cause de hausse des prix et des charges, il a che un score évoluant entre 2% et 5% par an, selon la localisation. « A condition d’être hypersélectif sur la qualité de l’emplacement, cet investissement est une bonne carte à jouer en contrepartie d’une détention sur une longue durée. De plus, l’immobilier est porteur de plus-value potentielle que l’on ne trouve pas dans d’autres placements », indique Olivier Rozenfeld, président fondateur du groupe Fidroit.
Depuis des années, l’Etat multiplie les dispositifs fiscalement incitatifs afin que les particuliers achètent et louent sur une longue durée. C’est une façon d’accroître à moindres frais un parc immobilier locatif privé sous tension. Du « Malraux » au « Censi-Bouvard », en passant par le « Pinel » et le « Monument historique », le choix est large. Et, depuis le 1er janvier dernier, un nouveau dispositif s’est rajouté à cette liste : baptisé « Denormandie » (du nom de l’actuel ministre du Logement), il s’applique à l’achat de logements anciens. Son intérêt : ouvrir droit à un avantage fiscal de 12% à 21% du prix du bien, à condition de le louer durant six, neuf ou douze ans et d’y réaliser au moins 25% du coût total de l’opération en travaux. Cette mesure fiscale cible surtout les logements situés dans des communes signataires de la convention dite « Action coeur de ville ». Selon le site MeilleursAgents.com, à ce jour, 70% des villes moyennes seraient concernées par le « Denormandie ». En croisant plusieurs données, cette plateforme a même établi une short list de communes « Denormandie compatibles », à savoir Limoges (Haute-Vienne), Corbeil-Essonnes (Essonne) et Sarrebourg (Moselle).
Le bon emplacement
Prolongé jusqu’au 31 décembre 2021, le « Pinel » reste centré sur le neuf. Depuis cette année, il n’est réalisable que dans deux zones géographiques (A et B1) sur les quatre existantes (1). Pour mémoire, opter pour ce dispositif, c’est réduire son impôt sur le revenu de 12%, 18% et 21% du montant investi en cas de location nue obligatoire sur six, neuf ou douze ans. Les économies d’impôts sont étalées sur toute la durée d’occupation du bien. En contrepartie, le respect de plusieurs règles est nécessaire : se limiter à un investissement de 300 000 euros par an, sans dépasser 5 500 euros le mètre carré ; choisir un locataire dont les ressources sont éligibles à un barème fixé par l’Etat et respecter un plafond de loyer.
Si l’o re de logements neufs semble su samment abondante pour s’adapter au Pinel, tous les programmes ne s’y prêtent pas. L’emplacement doit être central ou tout du moins bien desservi. Un autre écueil consiste à surpayer le logement. Car, gourmands, les promoteurs et les intermédiaires ont la fâcheuse tendance à pratiquer des prix « hors marché ». Du coup, ce que l’on gagne en avantage fiscal, on le perd en achetant trop cher. Et, en cas de revente, on risque d’y perdre.
Dans l’ancien comme dans le neuf, un rendement locatif n’est jamais garanti. Aucun bailleur n’est à l’abri d’une défaillance de son occupant (impayés de loyers, dégradations) ou d’une vacance locative. Une protection est conseillée via une assurance loyers impayés, mais celle-ci viendra raboter le rendement.
Un autre élément susceptible de venir perturber une opération dans l’ancien : le retour annoncé de l’encadrement des loyers. Depuis le 1er janvier, la loi Elan laisse le choix aux villes et aux métropoles de limiter les valeurs locatives pratiquées sur leur territoire. Il faudra éviter d’investir dans un secteur où l’on sait que la collectivité locale envisage de mettre en pratique cette mesure. Pour mémoire, cet encadrement concerne les locations nues et meublées.
Enfin, une dernière variable peut changer la donne en cours de route : le renchérissement de la taxe foncière. La suppression partielle et déjà e ective de la taxe d’habitation pourrait conduire certaines collectivités locales à récupérer des recettes ailleurs. La majoration de la taxe foncière, supportée par les propriétaires immobiliers, se révèle dans certains cas une « solution » pour les exécutifs locaux. Cet impôt s’est déjà apprécié de 38,9 % depuis 2003, estime la Fnaim. Un paramètre incontrôlable susceptible, à terme, selon cette fédération, de détourner un particulier de l’investissement locatif.