L'Obs

Ren Hang, portraits chinois

Deux ans après sa disparitio­n, le photograph­e est exposé à la Maison européenne de la Photograph­ie. L’occasion de découvrir son érotisme insolent et sa poésie crue

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La photo ? Pour lui, c’était simple. Ren Hang utilisait un petit appareil argentique, un Minolta. Ses modèles étaient des proches ou des gens qui le contactaie­nt sur son site internet. Parfois, il faisait venir dans son appartemen­t pékinois un paon, un caméléon, des colombes, un serpent, un poulpe, des fleurs, des cerises : autant de volumes et d’éclats de couleur qui éclairaien­t les corps nus auxquels il faisait prendre des poses incongrues, les pattes en l’air, les cuisses écartées. Parfois, ces corps s’empilaient, formant des montagnes, des dunes, des totems. Très vite, l’ancien étudiant en marketing est devenu célèbre. Il expose dans le monde entier, les revues branchées le mettent à la une. En Chine, son pays natal, c’est une autre a aire. Est-ce pour ne pas troubler la mémoire du Grand Timonier (en chinois, l’idéogramme « mao » signifie, entre autres, « poil ») ? Toujours est-il que ses clichés laissant voir les poils de ses modèles sont décrochés des salles d’exposition. Ren Hang a beau ne pas vouloir apparaître comme un opposant au régime, on ne vient pas moins lui rappeler, par censure interposée, qu’en Chine, la nudité est une faute politique. Pour la première fois, la Maison européenne de la Photograph­ie, à Paris, organise une grande exposition des oeuvres de ce provocateu­r qui n’ignorait ni l’humour ni la poésie. Ses images sont des instants fragiles. Leur érotisme est insolent, incongru. On aimerait dire qu’elles sont un hymne à la vie. Le dernier mot est pourtant mal choisi. En février 2017, à l’âge de 29 ans, ce fils d’un cheminot et d’une ouvrière a mis fin à ses jours. Aujourd’hui, ses photos sont devenues des icônes et on pourra lire à la MEP les poèmes qu’il composait. Evoquant sa disparitio­n, il écrivait que cette « chute sans fin sera aussi une manière de voler ». C’est une image, bien sûr. Une photo que Ren Hang n’a jamais prise. Bernard Géniès « Love Ren Hang », jusqu’au 26 mai, à la Maison européenne de la Photograph­ie, Paris-4e

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 ??  ?? RH08 Untitled.
RH08 Untitled.
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 ??  ?? RH04 Untitled, 2015.
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 ??  ?? RH02 Untitled, 2011.
RH02 Untitled, 2011.
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RH06 Untitled.
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