L'Obs

Total Bashung

IMMORTEL, PAR ALAIN BASHUNG, INTÉGRALE 24 CD (BARCLAY).

- SOPHIE DELASSEIN

L’objet est impression­nant, son contenu presque intimidant. Il faudrait quelques jours de RTT, ou carrément prendre sa retraite anticipée, pour maîtriser cette somme. « Immortel », qui se présente comme la troisième intégrale d’Alain Bashung (1947-2009), compte 24 CD, c’est dire s’il faut vivre vieux pour espérer en saisir toutes les finesses. Car ce qu’il y a de fascinant chez Bashung, c’est sa faculté à changer de style musical à chaque album. Peur de lasser son public ou de s’ennuyer lui-même ? Les deux, certaineme­nt. Outre les albums en studio qu’on connaît dans l’ensemble, la moindre des politesses serait que cette intégrale offre quelques curiosités. Des chansons inédites, surtout. On brûle de les entendre, mais on poursuit l’exploratio­n de la somme – s’y précipiter trop vite reviendrai­t à jouir sans préliminai­res. Parmi les pépites peu connues du grand public, on trouve l’enregistre­ment complet de l’album « l’Homme à tête de chou », de Gainsbourg, par Bashung. Rappelons que le premier avait écrit pour le second l’essentiel de l’album « Play Blessures », en 1982. On trouve aussi des perles qui témoignent de la complicité artistique qui le liait à sa seconde épouse, Chloé Mons, comme « le Cantique des cantiques » et « la Ballade de Calamity Jane ». C’est à Chloé Mons que l’on doit l’album posthume « En amont », sorti fin 2018, avec des paroles de Dominique A, Arman Méliès, Joseph d’Anvers ou encore Raphaël, que Bashung avaient écartés de « Bleu pétrole », en 2008. D’autres raretés révèlent les talents d’interprète pur du défunt chanteur, sur des chansons d’Hugues Aufray, de Jacques Brel et, bien sûr, de Léo Ferré qui l’avait tant influencé au moment de « l’Imprudence ». Enfin, on découvre quatre véritables inédits. Ils ont récemment été retrouvés chez Boris Bergman, auteur majeur de Bashung, et dateraient de leurs débuts, vers 1976-1977. Au milieu des solos de guitare, la voix est méconnaiss­able, très juvénile, mais les titres, intenses. Du grand Bergman, chantre des déceptions amoureuses sublimées. L’esprit d’Alain Bashung, mort il y a dix ans le 14 mars 2009, hante chaque morceau de cette oeuvre pléthoriqu­e et plurielle.

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