L'Obs

TRUQUAGE À TOUS LES ÉTAGES

- P. B. G.

Donald Trump peut-il retarder ou perturber l’élection du 3 novembre ? C’est ce qu’a suggéré

Joe Biden le 23 avril : « Souvenez-vous de ce que je vous dis : je pense qu’il va essayer de faire reporter les élections d’une manière ou d’une autre, trouver des raisons pour lesquelles elles ne peuvent pas avoir lieu. » Cette hypothèse d’un coup d’Etat électoral a de quoi inquiéter, sachant que l’intéressé est prêt à tout. Problème : dans la réalité, Trump ne peut pas changer la date de la présidenti­elle. Comme le stipule une loi fédérale de 1845, elle se déroulera le mardi suivant le premier lundi de novembre, soit, cette année, le 3 novembre. Pour changer cette date, il faudrait que le Congrès vote une nouvelle loi, ce qui est exclu vu la majorité démocrate à la Chambre des Représenta­nts. Même si par extraordin­aire une telle loi était votée, la nouvelle élection ne pourrait être qu’à peine retardée : la Constituti­on ordonne que le Congrès (élu en même temps que le président) prête serment le 3 janvier, et elle fixe le début du mandat présidenti­el au 20 janvier. Mais le 23 avril, Biden a fait une autre prédiction qui, elle, indique un vrai danger : Trump « fera tout son possible pour rendre le vote très di cile. C’est la seule façon dont il pense pouvoir gagner ». Certaines arnaques électorale­s bien connues seront poussées à l’extrême en 2020, comme la limitation du nombre de bureaux de vote dans les zones démocrates. Depuis un arrêt de la Cour suprême de 2013, on estime que 1 700 points de vote ont été fermés, principale­ment dans le Sud. En Géorgie, le secrétaire d’Etat (chargé des élections) a fermé 214 de ces bureaux et purgé 670 000 personnes des listes électorale­s, bidouillag­es qui lui ont permis d’être élu de justesse gouverneur en 2018. Dans la Floride voisine, les législateu­rs républicai­ns ont torpillé, en imposant de nouvelles conditions, le résultat d’un référendum qui rétablissa­it le droit de vote aux anciens prisonnier­s. Autre tactique : l’intimidati­on. Les républicai­ns ont prévu de mobiliser 50 000 volontaire­s dans 15 Etats clés pour

« surveiller », comme ils disent, le déroulemen­t du vote. Trump et le Parti républicai­n ne cessent de crier à la fraude électorale, alors que celle-ci est inexistant­e, pour empêcher le vote par correspond­ance, voire, en cas de défaite, jeter le doute sur le résultat de l’élection. Et la nomination d’un proche de Trump à la tête de la poste ne rassure pas ceux qui flairent un coup de Trafalgar : avec un vote par correspond­ance entravé ou interdit, les démocrates redoutent un scénario où la participat­ion électorale serait massive dans les bastions pro-Trump, largement ruraux et moins touchés par le coronaviru­s, mais plus limitée dans les Etats démocrates, certains électeurs craignant de se déplacer pour voter. Tordu ! En 2020, on peut s’attendre à tout.

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