L'Obs

LES AMBITIONS DE DARMANIN

- MAËL THIERRY ET SOPHIE FAY

Il s’est fait discret au début de la crise. Après deux mois confiné à Bercy, où il a relu les oeuvres de De Gaulle, Gérald Darmanin signe un retour bien visible. Il y a quelques mois, le ministre comptait sur sa réforme réussie du prélèvemen­t à la source, les bons chi res du déficit pour 2019 et les municipale­s pour renforcer son assise au gouverneme­nt. La crise du Covid-19 a contrarié ses plans en e açant sa réélection dès le premier tour à la mairie de Tourcoing (60,9% des voix) et en le ramenant dans l’ombre de Le Maire. Mais le très politique ministre des Comptes publics, proche de Nicolas Sarkozy et de Xavier Bertrand, a profité de la fenêtre qui s’ouvrait : réélu par son conseil municipal à la tête de la ville populaire du Nord le 23 mai, il a plaidé dans « le Journal du Dimanche » en faveur d’une priorité sociale pour la suite du quinquenna­t : la participat­ion salariale serait le moyen d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés sans taxer les plus riches. Une interview relue et approuvée par l’Elysée et Matignon. Une o re de service ? « Il est très proche d’Edouard, et d’une grande loyauté envers lui », assure un ami. Une chose est sûre : le trentenair­e ambitieux, autorisé à cumuler temporaire­ment son ministère et sa mairie, se verrait bien à un nouveau poste – il rêvait de l’Intérieur au précédent remaniemen­t – et joue en attendant d’un rapport de force en faisant planer la menace d’un repli sur sa mairie. Alors comment le contenter ?

Dans la liste des premiermin­istrables, il arrive tout en haut : Bruno Le Maire a été très visible pendant la crise, multiplian­t les annonces pour sauver les petits commerçant­s mais aussi Air France ou Renault. A Matignon – une maison qu’il connaît puisqu’il a été directeur de cabinet de Dominique de Villepin –, il pourrait être l’homme chargé de la reconstruc­tion de l’économie française.

« Bruno s’épanouit dans la crise, comment mieux être au service des Français que dans des moments comme celui-là ? » dit un de ses proches, qui assure que le ministre a été très tôt sur le front anti-Covid. Le 15 mars, soir des municipale­s, il discutait au téléphone directemen­t avec le président de la République du dispositif de chômage partiel. Sans passer par la case Matignon. Autre avantage : son directeur de cabinet, Emmanuel Moulin, qui a géré la crise de 2008 sous Nicolas Sarkozy, est un proche du secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler. Au gouverneme­nt, certains de ses collègues ironisent sur l’o ensive médiatique de Le Maire, posant les pieds sur la table dans son bureau. Mais l’intéressé assure qu’il est bien à Bercy, un poste à sa mesure : il y jouit d’une grande autonomie, tantôt côtoyant les grands de ce monde au G20, tantôt au chevet des salariés français. Pour Emmanuel Macron, son éventuelle nomination soulèverai­t une question, formulée par un juppéiste : « Qu’est-ce qu’apporte en plus Le Maire ? Est-ce qu’il ne réduit pas la base de soutien dans l’opinion par rapport à Edouard

Philippe ? » Lorsqu’il était candidat à la primaire de la droite, l’ancien ministre de l’Agricultur­e de Sarkozy avait choisi pour slogan « Le renouveau, c’est Bruno ». Plus di cile à porter aujourd’hui après deux ans et demi à Bercy.

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Le ministre de l’Economie s’entretient avec ses conseiller­s avant l’Eurogroupe, le 9 avril.
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